Peut-être suis-je biaisée par les itérations plus récentes et modernisées d’Arsène Lupin, mais cette version de 1957 m’a laissée quelque peu de marbre. Le film n’est pas dénué de charme : les intrigues de cambriolage et de duperie sont plutôt bien ficelées, et on retrouve ce plaisir de jeux de l’esprit. Les décors sont soignés, la réalisation, classique mais efficace, ne souffre d’aucun faux pas notable.
Mais j’ai vraiment eu du mal avec la version de Lupin incarnée par Robert Lamoureux. Ce Lupin-là est peut-être suave et intelligent dans ses actions, mais sa condescendance envers ses propres domestiques, Léontine ou la baronne Mina von Kraft donne envie de lui coller une tarte. Oui, son badinage avec l’empereur Guillaume II a un certain charme, mais cela ne suffit pas à racheter cette personnalité imbuvable et méprisante. Pour moi, Arsène Lupin a toujours eu une aura de Robin des Bois des temps modernes : un voleur certes caustique, mais qui défie les riches et les puissants tout en gardant une certaine noblesse d’âme. Oui, il peut se jouer et abuser de chacun, quel que soit sa classe, mais justement sans mépris de classe, sans cruauté gratuite. Ici, ce n’est pas un gentleman cambrioleur, mais un aristocrate imbuvable qui semble mépriser tout ce qui n’est pas lui-même. Peut-être qu’en 1957, ce portrait passait mieux, mais pour moi cela enlève toute sympathie au personnage ; et par extension, envie de savoir ce qu’il advient de lui.
Le duo entre Léontine et Arsène/André aurait pu être intéressant, justement parce qu’elle lui tient tête… mais c’est vite oublié. C’est dommage, car le casting est plutôt brillant. Les prestations sont solides — j’adore O.E. Hasse en empereur et Georges Chamarat en inspecteur dépassé. Mais même eux semblent se heurter à l’ombre écrasante de ce héros à la morale douteuse.
Les aventures d’Arsène Lupin peine à transcender son époque. L’œuvre n’a ni la légèreté nécessaire pour séduire aujourd’hui, ni la profondeur pour marquer durablement. Et quand on sort d’un film intitulé "Aventures" en s'ennuyant, c’est qu’il y a un problème.