Comme quelques-uns, le visionnage des Aventures de Winnie l’ourson ne me semblait guère indispensable au sein d’une rétrospective animée de Disney : primo car chacun a finalement tôt fait de s’approprier la définition d’un « Classique », par-delà les standards officiels donc, et secundo car cette adaptation de l’œuvre d’Alan Alexander Milne arborait une dimension enfantine des plus prépondérantes... au point de friser le handicap pur et dur.
Un a priori tenant du paradoxe dans la mesure où je n’avais, pour ma part, jamais assisté aux déambulations de Winnie : une découverte sur le tard donc, bien refroidie par la perspective d’assister au simple assemblage de trois moyens-métrages sous pavillon Disney. M’enfin, le pressentiment se justifie bien au terme de cette petite virée au cœur de la Forêt des rêves bleus : le récit hautement gentillet se destine avant tout à un public de bambins. Heureusement pourvu d’une relative courte durée, Les Aventures de Winnie l’ourson sont donc bien en peine de satisfaire le spectateur adulte, ou tout du moins celui ne pouvant se raccrocher au phare enthousiasmant de la nostalgie.
Aussi, plutôt que de digresser en long et en large sur la simplicité de ses trois sous-intrigues, penchons-nous brièvement sur deux éléments rehaussant l’intérêt du tout : sa narration et ses personnages. Car si l’on pouvait tout d’abord craindre que la succession des différentes péripéties soit réduite à son plus simple appareil, il en est en réalité tout autre : le film se pare en ce sens de quelques transitions malignes frisant la mise à mal du quatrième mur, le support littéraire servant à la fois d’incarnation physique d’une narration taquine et de ressort propre à la progression du récit.
Deuxièmement, il serait de bon ton de s’attarder davantage sur la fantasque clique animalière des Aventures de Winnie l’ourson : en effet, sous le vernis enfantin et sans conséquence qu’imprime à l’envie une atmosphère des plus colorée, nous pourrions presque entrevoir un sous-texte plus savoureux qu’escompté. Simplet comme pas deux, Winnie cumule d’autres tares bien dommageables, boulimie et impolitesse lui conférant par voie de fait une étiquette de parasite inoffensif non moins contrariant (il me rappelle d'ailleurs un célèbre personnage animé jaune).
Tigrou abonde dans une veine similaire en cochant les cases du trouble-paix exubérant à qui l’on cède tout, quand bien même l’intrigue lui étant dédié multiplierait les appels du pied à une morale hasardeuse. À contre-courant de ces derniers, Coco Lapin et Bourriquet subissent sans cesse l’action et, surtout, la traite différemment : si le premier se fend d’un comportement à la limite de la bipolarité (ses élans machiavéliques sont éloquents), le second est quant à lui un modèle de fatalisme morne... soit un « duo » d’énergumènes dénotant quelque peu à l’échelle d’un tel divertissement pour enfants.
Nous pourrions pousser « l’analyse » davantage, en évoquant notamment le stoïcisme nonchalant de Maître Hibou (bel olibrius que voilà), mais vous avez compris l’idée : Les Aventures de Winnie l’ourson vaut étonnamment le coup d’œil mais n’est pas, loin s’en faut, un « Classique » indispensable. À voir une fois et puis c’est tout.