A contrario de ce que j'ai pu lire, de l'action il n'en manque pas dans ce film, truffé de scènes destinées à faire monter votre adrénaline !
Je fustige souvent les récits qui ne sont bons qu'à être joués sur les planches d'une scène de théâtre car le cinéma n'est pas fait pour ça ! D'ailleurs, une des premières vues sur grand écran ne fut-elle pas ce train fonçant vers une foule de spectateurs ...paniqués à l'idée d'être écrasés...
Au contraire, et comme ici, le cinéma lui, nous permet de découvrir des espaces nouveaux, des contrées lointaines où l'on ne mettra jamais les pieds, le tout faisant rêver à des épopées impossibles qu'on ne pourra jamais connaître ou s'offrir.
Ce que précisément et à contrario le théâtre ne permet pas. L'intérêt de ce dernier n'en est pas moins négligeable, de par cette proximité du spectateur avec le comédien, de cette étroite communion, de cette ambiance complice, , de cette spontanéité qu'il crée, de cette impression d' être avec le dompteur dans la cage aux lions. Ou encore de ce trapéziste qui va s'élancer dans le vide comme au cirque risquant de se rompre le cou...
Tous les éléments sont réunis pour démontrer cette réalité que ne permet que le cinéma, et avec ici un merveilleux fou du manche à balai volant (Delon) dans sa drôle de machine : un Stamp, vraisemblablement, bien connu des "vieilles tiges" ?
Lequel s'est mis en tête de passer sous l'Arc de Triomphe (le survol de Paris étant formellement interdit, ça lui coûtera sa licence de pilote) avec aussi un autre doux-dingue des cascades et de la vitesse automobile (Ventura) qui avec son "drag" veut pulvériser sur l'aérodrome du premier, le record de vitesse sur roues !...
Lesquels vont être rejoints dans leurs folies aventurières par une jolie et conquérante blonde (Shimkus) qui elle, chine dans les casses des ferrailleurs pour les ressusciter en oeuvres d'art...
Un "César" version féminine, telle celui ayant fait partie des "nouveaux réalistes" snobé par le monde de l'art. Mais ayant créé le trophée cinématographique convoité que chacun connaît !... Et que décrochera à deux reprises Enrico, mais pas pour ce film-ci !
Ce trio s'étant mis en tête de retrouver un trésor au Congo va même s'adjoindre un complice en cours de route (Reggiani) Lequel fait une prestation aussi brève (hélas !) que convaincante.
Bref, ce scénario du réalisateur Enrico, flanqué d'un de ses romanciers préférés Giovani et de Perigri, fourmillle d'idées et de péripéties diverses pendant lesquelles on ne s'ennuie pas un seul instant...
Le travail de recherche en amont du tournage a dû être conséquent pour nous révéler autant de trouvailles !
Comme ce vieux fort délabré au large de La Rochelle où se déroule la fin du film : Fort Boyard ! On ne savait trop qu'en faire lorsque Enrico le révéla par ce film à Jacques Antoine qui eut l'idée d'en faire le théâtre d'un jeu télévisé assez original genre "Intervilles" de Guy Lux, en plus réduit, mais devenu depuis lors une véritable punition institutionnelle du petit écran à force de se répéter...
Une histoire pleine de rebondissements, mais quel casting pour le mettre en valeur !
Je ne reviendrai pas sur Ventura et Delon dont le talent un à lui seul un gage d'entrées en salles. Dès le départ, on se dit que Joanna Shimkus, peu connue alors des producteurs (et découverte par Enrico) va tomber amoureuse du séduisant aviateur...
Dans la réalité, la tension entre les deux acteurs était palpable : à cette époque, Delon avait croisé le fer avec l'équipe de production car il voulait absolument imposer dans ce rôle Nathalie Delon.
Il n'a sûrement donc pas cherché à jouer à fond le "faire-valoir" de la belle actrice.
Pourtant belle et à mi-chemin entre une Mireille Darc, un zeste de Jane Birkin et la fantaisie d'une Marlène Jobert, elle a aujourd'hui (2024) 80 ans, et avait mis un terme à sa courte carrière en 1970 avant d'épouser l'acteur Sydney Poitier...
Delon semble ici minimiser ses talents habituels de charmeur, semble plus froid, plus "copain" ...
Mais la cerise sur le gâteau de ce film, c'est sans conteste son accompagnement musical !
François de Roubaix (en fait né à Neuilly sur Seine) rêvait de devenir réalisateur, comme son père aussi producteur, et dont Enrico fut l'élève...
Les deux hommes étaient donc très proches... Et est-ce la raison de cette proximité, ou du talent de François, la musique est divinement belle. A des lieues des déluges de basses qu'on nous inflige à gogo dans de nombreuses productions modernes !
Chaque note, chaque soupir est musicalement écrit comme si le compositeur avait écrit sa partition en voyant les images se dérouler sous ses yeux...
Une aussi parfaite conjonction entre la musique est rare, mais Ennio Morricone savait lui- aussi se couler dans le moule du film, bien que plus exubérant dans son œuvre, mais en moins diversifiée...
L'avenir brillant de l'illustrateur sonore et compositeur de François de Roubaix fut stoppé net avec son décès accidentel... Fada de plongée sous-marine (comme les héros de ce film) il prit trop de risques lors de l'une de ses explorations et disparut à Ténérife à l'âge de 36 , laissant deux orphelins...
C'est son père qui alla chercher le césar que la profession lui décerna à titre posthume en 1976 pour la musique du film "Le vieux fusil", chef d'oeuvre lui aussi d'Enrico...
Admirable...
.
Arte le 02.03.2022- 15.03.2022- 08 et 16.09.2024-