Robert Enrico est une valeur sûre du cinéma français des années 50 à 80. Entre autres, il a mis en scène plusieurs romans de José Giovanni ; ma découverte assez tardive de ce film fait que je n'ai pas lu le roman éponyme de Giovanni. Il me reste à le trouver ...
Si j'ai bien compris, ce film n'est que l'adaptation de la première partie du roman. La deuxième partie a été adaptée par Giovanni lui-même sous le titre "la loi du survivant" dont le titre me semble cohérent avec la première partie ... Film qu'il me reste donc aussi à trouver ...
Trois amis, deux hommes et une femme, Roland, Manu et Laetitia, dans la "petite" force de l'âge vivent chacun leur passion au quotidien sans chercher à faire fortune. Pas bileux pour deux sous. Pour le fun. Pour le plaisir de réussir que ce soit un prototype révolutionnaire, un exploit aéronautique ou une exposition de sculpture moderne. Lorsque cela n'est plus possible ou que ça ne marche plus, ils décident de partir ensemble à la recherche d'un trésor au fond de la mer au large du Congo; Mais c'est alors que les ennuis commencent.
C'est un film d'aventures cool. J'ai cherché un moment le bon adjectif. Cool, me semble bien.
Par exemple, j'ai bien aimé la scène où Laetitia fait une démonstration de son art en sculpture moderne (à partir d'éléments de carrosserie) à ses deux amis épatés et pas très rassurés lorsqu'ils la voient prendre le chalumeau en main.
Ou encore, lorsqu'ils prennent la décision de partir au Congo, la "communion", au sens païen, de l'évènement s'opère en une danse africaine endiablée sur base de "samba" à partir des ferrailles de l'atelier.
On est heureux pour eux.
Il y a un truc qui est beau dans le film et qui le rend vraiment sympathique : il n'y est pas question d'amour et encore moins de sexe même si Roland et Manu sont archi-secrètement amoureux. On sent que le moindre geste déplacé, le moindre minuscule aveu de la part de chacun des deux hommes causerait la rupture de cette entente délicieuse entre les trois personnages. Et lorsque Laetitia ose dire à Roland, un jour en tête à tête, qu'elle aimerait vivre avec lui, elle se heurte au silence même si Roland en est secrètement flatté.
Il est temps de parler du casting car il vaut son pesant d'or.
Roland, c'est Ventura dans un rôle de gros nounours qui n'aime pas qu'on le bouscule mais qui ne plaint jamais son amitié. Il est émouvant et respectable dans sa pudeur ... Sa passion pour construire un nouveau moteur de dragster fait sourire les pros de l'écurie Matra mais c'est égal.
Manu, c'est Alain Delon, encore jeune qui l'incarne. C'est le casse-cou qui tente des exploits avec son avion, par exemple sa tentative de passage sous l'arc de triomphe. Il est commandité par une bande de snobs très friqués qui le prennent pour un zozo. C'est un Alain Delon à contre-emploi mais du coup il développe un personnage sympa et à l'amitié sincère.
Et Laetitia ? C'est une actrice canadienne, Johanna Shimkus qui s'y colle ; je ne connais pas bien cette actrice qui a joué aussi pour Enrico dans "Ho !". Elle amène une belle fraîcheur dans le groupe d'amis qui l'adopte naturellement ; on lui doit aussi une belle séquence d'émotion dans le film mais je n'en dis pas plus sur le sujet.
D'autres acteurs complètent ce casting avec Serge Reggiani dans un rôle ambigu ; comme souvent avec cet acteur qui semble toujours sous le coup d'une malédiction ou d'une sombre fatalité.
Paul Crauchet joue ici un rôle, un peu à contre-emploi, de snob entouré de minettes dont on pet penser qu'elles ont plutôt intéressées pour son fric ...
Guy Delorme, le classique méchant des films de cape et d'épée, ici, se recycle dans le rôle d'un tueur !
Il y a un autre personnage dans le film qui est le fort Boyard qui à cette époque-là était plus ou moins à l'abandon. Il devient objet de fantasme puis objet de recueillement avant de terminer en lieu de règlement de compte.
J'aime bien ce film que je considère comme un bon film d'aventures, plutôt palpitant, dont la tonalité douce-amère garde un caractère bien sympathique.