En 1981, plus de six millions de français se ruent dans une grotte obscure peuplée de sièges rouges, évitant soigneusement les pièges dans lesquels le débutant périra (le popcorn sous les pieds, la porte qui s'ouvrait dans l'autre sens, le géant qui s'asseoit devant...), afin d'obtenir leur trésor tant convoité... Non, pas une statue bouffie et dorée, mais un archéologue ultra-classe avec son fedora marron vissé sur la tête, et son fouet prêt à le sortir de toutes galères : Indiana Jones. Ils ont eu du nez, ces chineurs de bon film, puisque ce premier opus réunit quelques noms de qualité : Steven Spielberg à la réalisation (dans son âge d'or), John Williams à la musique (un thème musical instantanément culte), Georges Lucas à l'écriture et à la production (l'histoire raconte que Steven et lui ont "inventé" Indy sur une plage d'Hawaï pendant des vacances communes... On imagine bien : "Tu veux un mojito ou une Pina Colada ?" / "Je veux un archéologue qui combat des nazis." / "Allez, je prends pareil.") et bien évidemment Harrison Ford, l'âme vivante de ce héros au charisme involontaire (ce qui en fait une double-dose d'admiration pour le spectateur qui est lassé des gros bras et des belles gueules parfaites). C'est donc avec Les Aventuriers de l'arche perdue que va commencer une formidable saga, qui deviendra le doudou de bon nombre de spectateurs, traversant les générations sans trop de problèmes (elle vieillit très bien), sera rediffusée inlassablement les après-midis en période de fêtes (on ne la loupait jamais), et passera dans le langage courant de la culture pop. Mais avant toute cette montée en puissance, le film d'aventures dépaysant qu'est ce premier opus nous offre humblement son ouverture dynamique (pièges, indigènes, avion qui peine à décoller...), son intrigue un peu foutraque (on ne comprend pas très bien les tenants et aboutissants de cette chasse à l'arche, et on sait pertinemment que si les nazis avaient ouvert l'arche tout seuls,
ils seraient morts, fin du film sans besoin d'Indy
), ses grands moments d'action mémorables (et un peu trop ponctuels, on se l'avoue) et surtout son côté très bavard. C'est ce qui nous fera toujours préférer le troisième opus (notre coup de cœur d'enfance), avec son humour décuplé et son binôme (Harrison Ford et Sean Connery) qui ne nous laissent jamais une seconde pour nous ennuyer. Mais comment bouder son plaisir devant ces multiples paysages traversés, ces énigmes à résoudre, ces indices à découvrir pour continuer à avancer avec Indy, ce héros qui s'étonne toujours de son propre succès, cette musique entêtante qu'on ne lâche plus, cette scène de combat à l'aérodrome contre un colosse, ce final légèrement sombre, et cet immense soin apporté au film, qui lui assure de ne jamais prendre la poussière, décennie après décennie... Pas besoin de restaurateur de collection, Les Aventuriers de l'arche perdue ne vieillit pas.