La guerre du Vietnam a profondément divisé la société américaine. Le cinéma n’a pas manqué de s’emparer du sujet pour faire passer des messages. Si la majeure partie des films ont dénoncé de manière directe ou indirecte cette guerre (Platoon, The Deer Hunter, Apocalypse now, The Big Shave), The Green Berets fait partie des rares films à l’avoir défendue et il fut le premier réalisé sur le sujet.
La guerre du Vietnam c’est la guerre de John Wayne. Il n’a pas fait celle de 39-45 et cela pèsera sur sa conscience jusqu’à la fin. Il a privilégié sa carrière d’acteur qui commençait enfin à décoller à ce moment-là. Il dit s’être proposé mais n’avoir jamais reçu de réponse. John Ford ne manquera pas de lui reprocher son choix et même de l’humilier sur le sujet à l’occasion. John Wayne cherchera à effacer cette « tâche » de son parcours, il le fera en devenant le plus patriote de tous les patriotes américains et en jouant dans des films de guerre les combats qu’ils n’a pu mener dans la réalité. Parmi ces films : The Green Berets dans lequel il prend ouvertement partie pour l’engagement de l’Amérique au Vietnam, défendant sans aucune nuance cette guerre. Il y perdra en popularité. Les soldats qui avaient connu l’horreur du Vietnam et la réalité du terrain, n’apprécieront pas cette vision fantasmée de John Wayne.
The Green Berets présente de « braves petits gars », selon l’expression même du film, heureux de se battre et de mourir pour cette cause, prenant soin des civils. Un colonel, campé par John Wayne, qui a demandé à aller sur le terrain. Il est totalement partie prenante de cette guerre et il domine la situation. Les Viêtcongs sont d’horribles méchants. S’il est difficile de nier les horreurs qu’ils ont pu commettre, rien n’est dit de celles commises par les américains qui sont ici les protecteurs des opprimés et des orphelins, les chevaliers blancs de la planète.
Une note discordante à ce tableau : un avocat du diable qui apparaît en la personne du journaliste mais c’est uniquement pour le faire remettre en place tout du long ; montrer qu’il ne sait pas de quoi il parle avant qu’il ne soit retourné comme une crêpe et convaincu à son tour du bien fondé de cette guerre.
Du point de vue de la réalisation, il n’y a rien à redire : de beaux plans, des scènes de batailles bien mises en scènes avec de formidables explosions. Les acteurs jouent bien, même si les personnages sont caricaturaux : le soldat débrouillard et bouffon ; celui qui attribue son nom avant de mourir aux toilettes du camp… le petit gamin vietnamien espiègle de façon plutôt lourde… Le colonel (Wayne) qui d’un seul mot rétablit la paix dans les familles. Tout est simple, édifiant quand il s’agit du côté américain.
La réception du film a forcément été tumultueuse… Pour finir, je laisse la parole à un vétéran de la guerre du Vietnam
On se serait crû devant un dessin animé, on avait jamais rien vu d’aussi drôle et d’aussi ringard. A la fin du film, John Wayne a son bras autour du petit orphelin, car on protège toujours les orphelins ! Et il dit : « c’est pour toi qu’on se bat fiston » et dans cette scène, le soleil se couche sur la mer de Chine, mais si on est sur la plage de Da Nang, ça voudrait dire que le soleil se couche à l’est. Dans la Bible, Josué arrête la course du soleil, mais John Wayne ne peut pas faire ça !
L’icône de mon enfance, l’acteur que j’avais mis sur un piédestal se révélait être un crétin, un abruti, qui faisait une propagande imbécile, qui présentait la guerre du Viet Nam d’une manière que même moi à vingt ans je savais être un ramassis de foutaises. C’était tellement décevant » (un vétéran du Vietnam)
Paroles amères qui expriment avec force la déception qui a été celle des soldats américains face au message clairement idéologique et propagandiste véhiculé par Joyn Wayne coréalisateur de ce film. Cependant quand on connaît l'histoire de l'acteur on peut comprendre facilement ses positions sans pour autant les approuver.