Un film très original de la part de Christian-Jaque, plus habitué des productions françaises traditionnelles souvent raillées par la Nouvelle Vague : d'abord lancé sur des rails qu'on croit prévisibles, avec l'assassinat d'un homme fortuné suite au changement (par sa femme) d'une ampoule administrée en intraveineuse par une infirmière, il s'engage par la suite dans une enquête policière retorse et un final au prétoire qui brillera par son écriture et sa capacité à suivre une voie rarement choisie au cinéma. La femme, interprétée par Marina Vlady avec beaucoup de talent, accuse l'infirmière Virna Lisi dans ce qui ressemble à un piège savamment orchestré. L'avocat de la femme, Pierre Brasseur dans un excès savoureux de manières aristocrates, accessoirement amant de cette dernière, la défend et lui obéit au doigt et à l'œil comme s'il était victime d'un ensorcellement. Et au milieu du vacarme, il y a Bourvil dans un rôle sérieux éloigné de toutes les comédies qu'on a en tête, en juge d'instruction intègre, patient, et agissant dans un but unique : la recherche de la vérité, loin du culte des apparences.
Dans un premier temps, on peut être un peu gêné par le caractère très ostentatoire de Marina Vlady qui surjoue quelque peu la femme ayant tendu un piège en remplaçant un médicament par un produit toxique, et faisant semblant de découvrir l'accident au moment exact où il vient de survenir. Mais finalement ce malaise disparaît assez vite dès lors que l'enquête déroule son cours et que les interactions entre les différentes parties s'affirment et s'affinent. Il y a un peu de Witness for the Prosecution dans Les Bonnes Causes, dans les rapports conflictuels et intéressés qui lient les personnages, à la différence près que Billy Wilder conserve la plus grosse part de mystère pour la fin là où Christian-Jaque termine son film sur une pirouette sarcastique. Ici, en ce qui concerne le meurtre, on est tout de suite placé dans la confidence et on n'a aucun doute sur la culpabilité ou l'innocence des deux femmes : c'est davantage sur le terrain des intentions et des manipulations que les surprises vont germer. Et puis c'est probablement l'un des plus beaux rôles de Bourvil dans un registre inhabituel, touchant et crédible, consciencieux et réservé, soumis à des pressions des coups bas de la part de la partie adverse et qui finira dans l'anonymat le plus total. Il y a beaucoup d'incohérences et d'invraisemblances dans le déroulement de l'enquête, dans le comportement des professionnels, mais ça n'enlève rien à l'originalité du scénario et de sa dynamique.
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