On connaît tous l'expression "pot pourri".
Beaucoup se sont même demandé, peut-être, pourquoi il y avait le mot "pourri" dedans.
Eh bien maintenant, ils savent.
Pas de mystères. Pour réaliser "Saint Seiya : la Légende du Sanctuaire", Casimir (le Monstre Gentil de l'Île aux Enfants) a adapté à l'écran sa fameuse recette du Gloubi Boulga. A savoir : prenez un grand saladier, balancez dedans un exemplaire du premier Bayonetta, un exemplaire d'Asura's Wrath pour la parité, trois épisodes de Gundam Seed pour les dogfights (oui, dogfights, vous avez bien lu), les trois premiers DVD d'Iron Man, une ou deux intégrales de Bioman (pour le côté "classe".Oui, vous avez bien lu aussi), une oreille de Kev Adams pour l'humour, un exemplaire de Tuning Magazine pour les armures, deux cinématiques de chez Square Enix pour les décors, Jack Sparrow, les chorégraphes du Roi Lion, les néons de la buanderie, trois MMO coréens gratuits et dix litres de vodka pour la sobriété. Ha oui, et tant que vous y êtes, collez le Seymour de Final Fantasy X en caméo pour le boss final. Ensuite, vous passez tout ça au mixer, puis au micro-onde, puis dans l'accélérateur à particules du CERN, vous laissez reposer dix minutes le temps que ça dégonfle (ça gonfle pendant une heure trente, c'est bien suffisant). Après quoi vous prenez un gros hachoir à viande et vous tranchez tous les morceaux trop fins, pas assez consistants, pour ne laisser que la bouillie et les bouts de saucisses.
Arrivé à ce point de votre réalisation, vous vous rendez compte que vous avez oublié de mettre du Saint Seiya dedans mais c'est beaucoup trop tard pour revenir en arrière et de toute façon, y'a plus la place, alors vous servez chaud et en 3D, vous passez le tout en avance accélérée, vous demandez à Yoshiki d'imiter Céline Dion et vous priez très fort pour que la cervelle du spectateur lui ait dégouliné par le nez pendant les cinq premières minutes, préalable indispensable pour apprécier cette méga compile NRJ.
Ce soir, au Sanctuaire, c'est soirée Techno. Vas-y bouge ton corps. Bob Sinclar est dans la place.
Si les plus optimistes/naïfs/indulgents auraient pu se réjouir d'une contextualisation plus "réaliste" au démarrage, ou saluer l'audace avec laquelle la façade du Sanctuaire aura été ravalée, ils déchanteront rapidement en constatant qu'à l'image du film, ces fausses bonnes idées ne sont que des coquilles creuses. Il faut dire que condenser en 90 minutes la mythique Bataille des Douze Maisons, déjà, en soi, ça fleurait bon le suicide créatif, genre "non mais laissez-moi je voulais être boulanger d'abord !", mais alors quand en plus, on étire la séquence d'exposition sur plus d'une demi-heure, on se dit qu'ils ont intérêt à pas traîner pour atteindre la vitesse de la lumière, les loulous. Pas de panique toutefois : le scénariste (qui voulait faire boulanger aussi) a la solution. Sur douze adversaires potentiels, nos valeureux héros n'en battent que trois (en comptant le boss final), ce qui n'est quand même pas un super quota, même pour des agents de la fonction publique. Mais bon, a priori, ils s'en foutent parce que leur destin, à la base, c'était d'être boulangers aussi, vous avez compris le principe.
Résultat : un spectacle fumeux et soporifique, dépourvu d'emphase, d'envolées lyriques, de character developement, une succession grossière de numéros façon Barnum Circus, exécutés à l’esbroufe sous un chapiteau mal monté, une hideuse orgie numérique émaillée de séquences qui donnent ses lettres de noblesse à l'art raffiné de la parodie involontaire (Deathmask et Aphrodite en tête), et ne conservent de la série originelle que les tics les plus agaçants.
Bon, ils ont sauvé Athéna, on peut au moins leur accorder ça.
Le film, par contre...
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P.S. : seul point positif : les quelques apparitions du Batman. Toujours aussi stylé, le mec. Je suis la Nuit. Je suis la Vengeance. Tout ça, tout ça.