État de piège
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Du montage orchestré au début du film sourd une tension palpable jusqu'à l'os : il s'agit d'une multitude de plans rapprochés sur les personnages, des plans très courts, hachés, cisaillés, desquels se dégagent un malaise qui laisse présager le pire. Peckinpah fait durer la tension entre le couple (et au sein du couple) et les villageois avant de la faire exploser dans une scène à la limite du supportable. Amy, complètement immature, séduit des hommes, flirte avec un ancien petit ami, et se montre seins nus à une fenêtre de la maison. "Allumés", les ouvriers iront donc satisfaire eux-mêmes leurs plus bas instincts. Peckinpah prône l'autodéfense, gratuite, justifiée "presque", tant le personnage de David est poussé à bout, sans pour autant se targuer de défendre la violence qui émane des scènes sanglantes.
Très controversé, l'acte du viol est insupportable. Et pourtant, les détracteurs du film eux-mêmes regarderont la scène jusqu'à la fin. Fascinés par la violence, que Peckinpah a toujours souhaité rendre esthétique, à travers le ralenti des scènes d'actions nous regardons quand même ce que nous réprouvons. De l'exorcisme de nos bas instincts par le cinéma. Personne n’encourage le viol en regardant cette scène insoutenable dans le film, cependant nous ne pouvons nous empêcher de regarder ce qui se passe jusqu'au bout. Instinctifs et voyeuristes, jusqu'au boutistes, exactement comme dans Basic Instinct de Paul Verhoeven, ou dans Fenêtre sur cour d'Alfred Hitchcock. Mais le traitement du voyeurisme n'est évidemment pas le même d'un Peckinpah à un Hitchcock.
Dans le livre de Gerard Camy "Sam Peckinpah, un réalisateur dans le système hollywoodien des années 1960 et 1970" on peut lire d'après Peckinpah que "les gens sont nés pour survivre. Ils ont des instincts qui remontent à des milliers d'années. Malheureusement, quelques-uns de ces instincts sont basés sur la violence. Il y a une grande tendance à la violence chez chaque être humain. Niez cette violence, et vous êtes perdus". Il y a là assurément beaucoup du fond de pensée de Peckinpah, ce qui permet d’ailleurs de comprendre la plupart de ses films. La violence présente dans son œuvre n'est pas justifiée, et il ne se permet pas de la justifier. Il dit simplement qu'elle existe, qu'elle est présente dans la réalité, et qu'on ne peut pas en faire complètement abstraction. Elle exerce une incontestable influence sur son cinéma, sur le cinéma, qui puisent dedans comme dans une source.
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le 18 févr. 2013
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