L'armée chinoise envahit l'Europe et finit par arriver à Paris.Les français qui n'ont pas fui s'adaptent comme ils peuvent à la nouvelle donne politique,chacun à sa manière."Les chinois à Paris",adaptation du roman de Robert Beauvais "Quand les chinois...",est le film le plus controversé de Jean Yanne,ici réalisateur,producteur,dialoguiste et coscénariste,qui a réussi pour l'occasion à se mettre tout le monde à dos et à frôler l'incident diplomatique.Personne n'a vraiment goûté cette farce au vitriol,pas plus le gouvernement chinois qui a protesté que ces enculés de maoïstes français qui ont incité à des actions violentes contre le film,sans parler du peuple hexagonal dépeint comme collabo dans l'âme.Associé à Jean-Pierre Rassam,le cinéaste a coproduit via sa société la Ciné qua non et s'est entouré de vieux copains,écrivant le script avec Gérard Sire et Beauvais,l'auteur du livre,tandis que Michel Magne,le compositeur des "Angélique",signe une musique stridente et que le graphisme est de Tito Topin,connu pour être le créateur de la série télé "Navarro" mais qui fut aussi le co-auteur avec Yanne de la mythique bande dessinée "La langouste ne passera pas".Le film a bénéficié de moyens importants et des rues entières de la capitale ont pu être bloquées et utilisées pour les besoins du tournage,ainsi que des bâtiments tels que l'Opéra Garnier,le château de Vincennes ou les Galeries Lafayette.Fidèle à son insolent cynisme,le réalisateur se livre à une descente en règle du comportement des français sous l'Occupation allemande tout en passant au lance-flammes la Chine post Révolution Culturelle.Tout y passe,à commencer par les diverses réactions des autochtones.Il y a ceux qui se barrent vite fait avant que l'ennemi n'arrive,en premier lieu le Président de la République qui,après un discours ferme appelant à la résistance se dépêche de prendre l'avion pour les USA.Pendant ce temps les gens se tirent et ça bouchonne sur l'autoroute,ce qui occasionne des rixes entre automobilistes qui finissent par s'entretuer alors qu'ils partaient parce qu'ils craignaient pour leurs vies.Quant à ceux qui restent,leurs attitudes sont diverses.Certains se convertissent sincèrement au marxisme-léninisme,devenant plus rigoristes que les chinois eux-mêmes,d'autres ont des velléités de révolte,la plupart subissent silencieusement en attendant des jours meilleurs,d'autres encore feignent par peur et par opportunisme l'adhésion aux idées communistes alors que les plus malins en profitent pour faire des affaires avec l'occupant et se remplir les poches.On retrouve des éléments bien connus de la Seconde Guerre Mondiale,incompétence crasse de l'armée française,lettres de dénonciation,antisémitisme décomplexé,tonte des femmes à la Libération par des résistants de la dernière heure,élites collaborationnistes allant au-devant des desiderata des nouveaux maîtres,ce joyeux jeu de massacre se doublant d'une critique véhémente du maoïsme à travers la description de chinois totalement formatés et décérébrés par leur doctrine.Disciplinés jusqu'à l'absurde,ridiculement psychorigides,hyper organisés,puritains à l'extrême,ils imposent leur modèle de société fasciste censé amener le peuple au bonheur socialiste.L'hilarante et longue séquence de la représentation du "Carmen" de Bizet à l'Opéra de Paris est à cet égard significative,d'autant que,chose incroyable,ce type de ballet a effectivement existé.Cette rigidité confine à la stupidité,comme le démontre cette idée imbécile de ne faire fabriquer dans chaque pays qu'un seul produit typiquement local.Découvrant que les français sont réputés pour être des fumistes,ces crétins de chinois qui prennent tout au premier degré décident qu'ils usineront uniquement des tuyaux de poêle. Il est cependant dommage que le scénario s'essouffle après ces effarants débuts et,faute de développements,sombre dans une confusion du discours et se réduise à un catalogue répétitif de comportements veules d'un côté et de bêtise lobotomisée de l'autre,entre fayotage immonde et exhibition de Petit Livre Rouge.Yanne s'emmêle un peu les pinceaux,fait trop long et aboutit à des conclusions nébuleuses pas très convaincantes.Au fil du temps c'est l'affairiste Forneret,joué par le réalisateur,qui prend l'ascendant sur le général Pou-Yen commandant la place,et qui lui dicte la politique à suivre selon ce qui arrange son business.Le rapport de force va s'inverser et c'est la décadence occidentale qui prendra le dessus sur le rigorisme asiatique,détruisant en quelque sorte de l'intérieur l'armée adverse.Ca reste cependant un bon film,gonflé,drôle et grinçant,qui en met plein la gueule à tout le monde et figure un monde assez proche du nôtre en fin de compte.Yanne l'acteur,impavide et nanti de son autorité naturelle,est fameux en affairiste opportuniste prouvant que ce sont toujours les margoulins rusés qui profitent de ce genre de situation.Il a convoqué un casting pléthorique constitué principalement d'habitués de ses films tandis que tous les acteurs asiatiques de Paris ont dû être enrôlés au vu de la très nombreuse figuration représentant l'armée d'invasion.Michel Serrault est savoureux en industriel converti au crypto marxisme,Nicole Calfan,d'une beauté lumineuse,est l'atout séduction du film,Daniel Prévost fait un de ses numéros d'anthologie en pseudo résistant à grande gueule qui s'empiffre chez son pote collabo,Macha Méril est son épouse matérialiste,Georges Wilson est un français moyen contraint d'héberger l'état-major chinois et Jacques François est comme d'hab impeccable en gouverneur chicos à l'échine souple.On a aussi le vieux Fernand Ledoux en académicien gâteux,le grand déplumé Michel Delahaye en évêque arrangeant,Bernard Blier en président lâche ou Paul Préboist en catho kapo.L'interprète de Pou-Yen est Kyozo Nagatsuka,acteur médiocre qui n'est pas chinois mais japonais.Les petits rôles sont tenus par Paul Mercey et Lawrence Riesner,les vieux complices de Yanne,Fernand Berset,Boramy Tioulong,plus connu en tant que réalisateur,les bisseux Michel Charrel et Jacques Insermini,le meneur de revue Jean-Marie Rivière dans son propre rôle avec sa troupe de l'Alcazar,et les deux Frères Ennemis André Gaillard et Teddy Vrignault,autres familiers des oeuvres de Yanne.On note curieusement de minuscules apparitions des acteurs pornos Etienne Jaumillot,Jacques Marbeuf,,Carmelo Petix et Manu Pluton,ce dernier étant par ailleurs un ex champion de culturisme.