Après deux films plus orientés action (Classe tous risques et L'arme à gauche, 1960-65), Claude Sautet se lançait dans des projets un peu plus intimes avec ce film écrit par Jean-Loup Dabadie et Paul Guimard d'après son roman. Yves Montand et Annie Girardot, ainsi que Lino Ventura déclineront l'offre, laissant la place à Michel Piccoli et Romy Schneider. Le film sera un succès avec près de 3 millions d'entrées et permettra à Schneider de continuer son virage plus sérieux, loin de l'image de Sissi.
On résume souvent Les choses de la vie à son accident de voiture, mais en même temps quel crash. Sautet le dévoile par petites touches. Tout d'abord par les témoins qui évoquent ce qui est arrivé : le chauffeur joué par Boby Lapointe a calé en pleine route, Piccoli arrivait trop vite et n'a pas assez anticipé, la voiture finissant dans un arbre après avoir expulsé son conducteur en plein vol. La séquence nous est ensuite montrée au ralenti, histoire de voir l'impact matériel et physique sur la voiture et Piccoli. Puis à vitesse réelle, confirmant la violence des chocs et que le crash n'était qu'une question de secondes. La scène est violente, spectaculaire et apparaît comme un mauvais concours de circonstance.
Ces moments de suspension dus aux ralentis permettent au personnage de Piccoli de revoir des moments de sa vie récente, avec son ex (Lea Massari), son actuelle compagne (Schneider), son fils (Gérard Lartigau), son père (Henri Nassiet) ou son associé (Jean Bouise). Chaque moment apparaît comme une longue pause entre les ralentis du crash, permettant de mieux connaître la victime et de l'accompagner vers son dernier voyage.
Dans ses dernières minutes, le film se veut logiquement plus métaphorique, la preuve avec l'éloignement du bateau ou un dernier repas aux invités surprenants. Mais également plus tragique. D'un côté, Massari qui fait ce qu'elle a à faire. De l'autre, Schneider qui part enthousiaste et dont le visage devient blême au fil des minutes. C'est elle qui illustre le dernier plan : un être épuisé, sous le choc et sans aucun but. La tristesse incarnée. Romy Schneider est superbe et la musique de Philippe Sarde fait tout le reste.
Le film est assez court (1h29 à tout casser), mais il aurait été difficile de faire "durer le plaisir" plus longtemps. Sautet signe donc un film à la durée idéale, concordant parfaitement avec son sujet. Les choses de la vie est un film touchant sur les petites choses que l'on fait, les relations avec les gens qu'on aime, les joies, les erreurs et les aléas de la vie. On dit souvent que l'on voit sa vie défiler devant ses yeux lors de nos derniers instants de vie. Les choses de la vie en est l'illustration même.
Les américains ont fait un remake du film en 1994 avec Richard Gere, Sharon Stone et Lolita Davidovich dans les rôles de Piccoli, Massari et Schneider. A l'image de Mixed nuts (Nora Ephron, 1994), Diabolique (Jeremiah S Chechik, 1996) ou de L'embrouille est dans le sac (John Landis, 1991), Intersection n'est pas resté dans les mémoires et ce n'est peut-être pas plus mal.