Depuis que François Damiens a des premiers rôles au cinéma, phénomène récent, on se rend compte qu’il a une présence assez exceptionnelle, doublée d’une sobriété constante dans le jeu, que son personnage soit bavard ou taiseux. Dans Les Complices, sa grande carcasse, toute de noir vêtue, remplit l’écran comme celle d’un Bruce Willis. Je ne cite pas cet acteur américain par hasard car Les Complices est une version à peine décalée, bien française cependant, de Mon Voisin le Tueur, comédie noire où Willis, la mine contrariée, subissait des voisins un peu trop envahissants. Une petite pensée, au passage, pour notre ami Bruce qui a, comme le vieux Don Diègue, tant de fois sauvé cet empire et qui ne le défendra plus avec son humour ravageur. On se demande bien qui va sauver le monde s’il n’est plus là ?
Le film est plaisant mais sans surprise, le scénario un brin fluet est secouru par des dialogues bien écrits, souvent drôles, où le talent de pince sans rire de Damiens est mis à profit pour le plus grand bonheur du spectateur. Le coup du tueur qui raccroche sans le feu vert de l’organisation et qui flingue à qui mieux mieux pour prendre une retraite bien méritée, on a déjà vu ça deux ou trois mille fois au cinéma, donc tout repose sur l’acteur et la mise en scène. La réalisatrice Cécilia Rouaud arrive à nous attendrir avec un personnage terrifiant, c’est déjà un joli tour de force. Un casting sympa, avec Vanessa Paradis en guest-star, entoure l’acteur belge avec l’empathie suffisante pour qu’il se sente moins seul dans son rôle de tueur dépressif qui a peur du sang.
Les prises de vue en décors naturels, toujours désertiques, lorgnent du côté des frères Cohen et de leur célèbre Fargo, la bande son évoque quelquefois le Tarantino de Kill Bill. Comme tous les films bourrés de références, Les Complices peut plaire et, pour les mêmes raisons, agacer, c’est selon. Les clins d’oeil ne sont pas trop appuyés et la touche personnelle apportée par François Damiens donne à l’ensemble une certaine originalité. C’est un film hybride, entre comédie policière et polar déjanté, la bicarburation au cinéma ça marche moins bien que sur les voitures, mais j’ai envie de dire « Pourquoi pas ? ». On passe un bon moment que l’on oublie aussitôt, c’est le cas de pas de mal de films, celui-ci n’est pas le plus mauvais de la bande, loin de là.