DreamWorks change d'ère !
Il y a encore quelques années, les amateurs de films d’animation ne juraient que par les studios Pixar. Il est vrai que la liste des films produits par la boîte californienne avait alors des allures de sans-faute: la trilogie «Toy Story», «Ratatouille», «WALL-E», «Le Monde de Nemo» etc. Autant dire qu’ils ne laissaient guère de place à la concurrence... et surtout pas à DreamWorks, qui s’empêtrait dans les médiocres suites de «Shrek» ou les poussifs «Madagascar». Et pourtant, en 2010, la compagnie créée par Steven Spielberg (DreamWorks donc) surprenait son monde avec «Dragons», dont la qualité venait rivaliser avec les meilleurs Pixar. En 2011, alors que les fans pensaient que les studios Pixar allaient prouver qu’ils étaient toujours les rois du genre, ces derniers accouchèrent du mauvais «Cars 2». Une erreur de parcours? Pas si sûr... En effet, l’année dernière, ils ont confirmé leur déclin avec «Rebelle». Très moyen, le film avait en plus le désavantage de s’inscrire dans la tradition celte et souffrait donc de la comparaison avec le fameux «Dragons». En attendant de voir s’ils arrivent à remonter la pente en juillet avec «Monstres Academy» (la suite de «Monstres et Cie», sorti en 2001), DreamWorks vient enfoncer le clou avec l’excellent «Les Croods» qui passera un peu partout dans le région en avril.
«Les Croods» raconte donc l’histoire d’une famille d’hommes des cavernes. À force de voir leurs voisins se faire piétiner par des mammouths ou se faire dévorer par des reptiles géants, les Croods – menés par Grug, le père de famille – ont développé une véritable phobie de tout. Reclus dans une minuscule caverne, ils ne s’autorisent que quelques rares sorties pour aller chasser. Parce que la sécurité passe avant tout, Grug enseigne la peur du monde à sa femme, sa belle-mère et ses trois enfants. Un véritable calvaire pour Eep, sa fille aînée qui entre dans l’adolescence et qui rêve de nouveautés. C’est alors que les continents se mettent à bouger et que le bouleversement sismique change radicalement la donne. Les Croods vont être obligés de quitter leur caverne et de se confronter au monde, plein de dangers...
Rappelant les premières minutes de «Toy Story 3», la scène d’ouverture des «Croods» est tout simplement délirante. Mettant en scène une partie de chasse aux allures de match de football américain, cette introduction permet de présenter tous les personnages en un rien de temps tout en nous plongeant instantanément au cœur de l’action. Le rythme est effréné, la maîtrise de la mise en scène est totale. Résultat: on a tout de suite la banane! Et la bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas prêt de s’arrêter.
C’est à ça qu’on reconnaît les meilleurs films d’animation: ils recèlent plusieurs niveaux de lecture et s’adressent ainsi à toutes les générations. S’il y a largement de quoi se tordre de rire dans «Les Croods» – les gags s’enchaînent à une vitesse folle –, son humour n’est jamais débilisant et il n’empêche pas non plus la réflexion. Les plus politisés d’entre vous pourront y voir un appel au progressisme et une condamnation de l’obscurantisme. Le film propose aussi un joli discours sur les conflits générationnels et questionne avec subtilité le modèle patriarcal qu’il remet en question sans pour autant l’anéantir.
Visuellement splendide – certains passages rappellent la planète Pandora d’«Avatar» – «Les Croods» nous entraîne dans une aventure terriblement efficace qui ne présente aucun temps mort. L’épisode de la découverte ébahie du feu ou du ciel étoilé sont des sommets de poésie et d’émotion. Présentant des environnements variés qui foisonnent de détails et un bestiaire hilarant, cette nouvelle production DreamWorks supplante toute concurrence et s’impose comme une leçon du genre. Ne le manquez sous aucun prétexte!