Dassin - Hellinger 1st Round
Brute Force ou Les Démons de la Liberté (1947), est un film très dur sur le milieu carcéral américain de l'époque. Avant de tourner, Dassin obtient la permission de passer trois jours dans une prison. Il ne connaît absolument pas la vie à l'ombre et il veut comprendre ce que c'est d'être enfermé. Déjà convaincu par la difficulté d'être prisonnier, il est à la recherche des sentiments procurés par l'enfermement. A peine entré, il ne pense qu'à une seule chose : sortir.
Pour écrire Brute Force, Hellinger engage Richard Brooks qui s'inspire de l'histoire d'un journaliste du San Francisco Examiner, Robert Patterson – je vous vois venir. Mettons de côté immédiatement les blagues qui pourraient faire référence à un jeune premier hollywoodien aux dents longues. La version 1 du scénario de Brooks est terriblement violente et ne laisse aucune chance aux prisonniers de la cellule R-17. Hellinger insiste pour rajouter des personnages féminins visibles à travers des flashbacks qui servent à comprendre les crimes des quatre prisonniers de la geôle. Il en fait ainsi des personnages presque héroïques qui méritent au moins l'absolution conditionnelle.
Le film est tourné en deux mois dans un garage des studios Universal et l'ambiance est très bonne. Tous les matins Burt Lancaster porte Dassin sur ses épaules. "C'était un animal mais pas bête du tout, il savait s'amuser et tirait une grande jouissance de sa force physique". Des débuts prometteurs donc malgré l'accueil mitigé pour le tandem Hellinger/Dassin. Ce film est assez mal reçu à cause de sa violence et de l'homosexualité plus que suggérée du capitaine Munsey. Ce film révèle aux yeux du grand public et des autorités, des conditions de détention proprement inacceptables et est à l'origine d'un certain nombre de réformes sur le système pénitentiaire américain. Fait remarquable quand on pense aux excentricités du système judiciaire américain.
C’est par ce film que je suis véritablement entré dans la filmographie de Dassin. J’ai une sainte horreur de l’enfermement mais cette histoire est je crois au contraire une forme de libération excessive. Tantôt allégorie de l’évasion de Dassin de la prison Mayer, tantôt planification d’un futur cinématographique qui s’annonce passionnant. Le studio et l’enfermement que l’on impose à Dassin depuis tant d’années sont prêts à brûler. L’hémorragie pénitentiaire qu’il met en scène dans Brute Force est je crois l’expression pure et simple d’un sentiment de violence et de contrainte que Dassin contient depuis trop longtemps. Il a un besoin vital de liberté qu’il ne saurait refouler une nouvelle fois, il a besoin de filmer la réalité et l’animosité sociale de la rue. Qu’à cela ne tienne, prenons acteurs et caméras sous le bras et sortons !
La suite Naked City !
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