C'est un film que j'ai vu à sa sortie en 1975 et qui, sur grand écran fait indéniablement de l'effet, la première fois. Je me demande toutefois si je l'ai revu (en entier) avant ce jour. Et si je l'ai acheté, c'est parce qu'il était à 5 euros à l'hyper où je fais mes courses...
Maintenant il me faut faire la critique et je vois qu'il y a 286 critiques (à ce jour) sur SC de ce film. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir raconter de plus ? ou de différent ?
Déjà, il y a deux façons de voir le film.
La première est celle de la plupart des gens, je pense. C'est l'aspect fantastique où l'homme est confronté à un animal qui lui fait la loi. Il y a eu ou il y aura les mygales géantes, les crabes, les ours, les loups, les fourmis et mon imagination est tout de suite en panne car je dois en oublier un paquet. Les vers par exemple. Oui mais des vers géants ... Ah, et puis les oiseaux (Hitchcock), bien sûr.
En général, ce type de film est construit toujours de la même façon.
1 - Des phénomènes inexplicables se produisent : des gens qui disparaissent ou qui sont salement amochés.
2 - En option : un conflit oppose celui qui a eu une idée de la cause avec les autorités qui ne font pas confiance au premier farfelu venu et qui sont soucieuses de l'ordre public
3 - Pour une raison x ou y, le monstre (ou le phénomène) se réveille.
Dans le même temps, certains le mettent en évidence et, enfin, impliquent les autorités
4 - la lutte s'organise avec là encore plusieurs étapes car les premières mesures sont insuffisantes, puis les secondes pas suffisantes jusqu'à trouver la bonne méthode pour éradiquer.
En option, il peut ne pas y avoir de solution auquel cas l'homme est mal et le spectateur rentre chez lui en rasant les murs ...
Tout ce long développement pour dire que ce n'est pas sur le scénario qu'on va pouvoir dire que le film est de qualité ou pas.
Comme le but de ce genre de film est de faire frissonner le spectateur (voire de le faire hurler dans la salle de cinéma), eh bien on va ramener la critique à une critique de la mise en scène et/ou du casting.
Là, pour ce qui concerne "Jaws" (ça fait mieux et c'est plus court...), la mise en scène est fort réussie avec de belles et efficaces scènes de suspense, de belles images de jambes coupées et de la mer qui devient subitement rouge, de cadavres qui sortent subrepticement d'un hublot, d'un requin vraiment vindicatif, énorme, à l'oeil mauvais et qui semble avoir un appétit sans limites. D'ailleurs la reconstitution du requin à peu près convaincante. Moi-même, avouons-le, j'ai sursauté quelques fois. Notamment lors des veillées d'armes sur le bateau. Et, comme toujours, c'est lorsque les gars, qui sont sur le pont H24, s'autorisent une petite pause avec alcools et chansons, que par pure coïncidence, le requin (intelligent) attaque. C'est la "loi de Murphy" plus communément appelée "loi de l'emmerdement maximum"
D'autres fois, j'ai souri, par exemple, au début quand le jeune poursuit une splendide nana qui ne demandait qu'à se faire rejoindre et que ce con, fatigué, ne trouve rien de mieux à faire qu'à s'endormir. Le requin, lui, n'aura pas la même hésitation, il la rejoindra.
Là dans ce film, il y a juste un truc complètement invraisemblable. C'est l'explosion d'une bouteille d'air comprimé (ou d'oxygène, c'est pareil) provoquée par une balle de fusil. Sachant qu'une bouteille d'air comprimé a une pression interne (dite de service) de 200 ou 300 bars, que la pression de calcul est sûrement au moins 1,5 fois cette pression de service et que la pression de rupture est au moins 3 ou 5 fois cette pression, je pense qu'il est impossible qu'un flingue soit capable de percer une bouteille et encore moins de l'ouvrir en deux. Il aurait mieux valu que Spielberg imagine un lancer de grenade ou quelque chose d'approchant pour que ça reste un peu crédible. C'est du détail, me direz-vous.
Le casting réunit des gens très différents : entre le flic (Roy Scheider) qui aux USA est une personne élue et n'a donc pas les coudées franches, un aventurier haut en couleur (Robert Shaw), chasseur émérite qui n'est intéressé que par la prime habilement négociée au prix fort et l'océanographe qui est à la fois un intellectuel mais aussi un spécialiste des requins, on a la parfaite dream team qui va pouvoir attaquer efficacement la bestiole. Les gens sont de nature tellement différentes que des frictions et sarcasmes sont inévitables. Mais l'expérience (militaire) montre que c'est comme ça qu'on obtient les commandos les plus efficaces.
Donc casting correct.
La musique de John Williams comporte un leitmotive - plutôt calme - qui est joué dès lors que le requin approche.
La deuxième façon de voir le film est de prendre de la hauteur à propos du comportement de l'homme face au danger.
Dans le film c'est les vacances d'été dans une station balnéaire, on est donc là pour s'amuser. On a payé cher pour profiter de tout. Pas question de se restreindre.
La même personne qui, dans la vie ordinaire, à la ville, est non seulement prudente mais exige de son patron qu'il prenne toutes les mesures de sécurité et se met en grève si le patron n'est pas à la hauteur, va ici, ne pas comprendre pourquoi il ne peut pas faire ce qu'il veut. Même chose pour tous ces sports ou activités dits "extrêmes" pour lesquels on prend des risques importants.
Ce comportement de l'homme n'évolue guère. Aujourd'hui, on observe les mêmes comportements, les mêmes prises de risque face à un danger ... Pire, on parle même d'atteinte insupportable à la liberté, si on est soudain restreint...
"Les dents de la mer" est un bon film notamment à cause de la mise en scène. Comme très souvent, j'apprécie le film de Spielberg lorsque je le vois la première fois. Et puis, le plaisir s'estompe et je n'éprouve pas forcément l'envie de le revoir. Cela vient peut-être de la pauvreté des dialogues qui est un peu, une constante chez Spielberg et ici en particulier (les dialogues insipides entre Sheider et sa femme ou encore au cours de la pause sur le bateau)
Là, par exemple, à l'époque, je n'ai jamais éprouvé l'envie de voir les moutures suivantes (qui ne sont pas réalisées par Spielberg). Cela sous-entend très certainement que j'avais trouvé le film plutôt bon et intéressant mais pas tellement plus.