Quand j'étais gosse, Les Dents de la Mer était un de mes films préférés. Comme tous les films qui avaient un rapport plus ou moins direct avec Spielberg, en fait... (quand t'es gosse et que tu vois écrit "Steven Spielberg" au début de Gremlins, Retour vers le futur, Jurassic Park, Indiana Jones, E.T., Les Goonies, Fievel, Le Petit Dinosaure et la vallée des merveilles, L'aventure intérieure, Qui veut la peau de Roger Rabbit ou Hook, bah il devient vite ton héros (oui en général quand t'es gosse tu fais pas trop la différence entre "réalisé par" et "produit par"))
Déjà que j'étais pas très rassuré dans l'eau, je tenais un film qui justifiait toutes mes craintes, qui donnait chair à mes angoisses abstraites. Parce que oui, on ne sait jamais, un requin peut très bien surgir à tout moment pour bouffer tout le monde, MÊME DANS UNE PISCINE.
La musique de John Williams résonnait en moi, et d'ailleurs dès qu'un piano se présentait à moi je m'amusais à la jouer (enfin, je CROYAIS que je la jouais, en vrai je martelais juste les notes les plus basses et mon imagination faisait le reste).
J'avais de la sympathie pour les 3 personnages masculins principaux, mais à vrai dire le seul qui me faisait vraiment de l'effet était le requin.
Car oui, même s'il me faisait flipper à mort, j'étais en totale admiration devant ce dieu des mers, même s'il ne ressemblait pas forcément à un vrai requin. J'aimais tous les animaux, mais comme beaucoup de gosses j'aimais surtout les prédateurs, ceux qui sont super puissants et/ou super intelligents (je n'avais pas encore conscience que l'intelligence peut se manifester dans des formes bien plus variées que seulement la chasse, notamment l'intelligence sociale de certains animaux). Un requin, ça donne envie de croire en Dieu tellement il semble parfait dans son rôle de tueur : forme fuselée, odorat incroyable, mâchoires d'acier, et cet aileron en guise d'étendard... Quand je vois un requin, j'ai un peu l'impression de vivre par procuration ce rêve irréalisable de voir un T-Rex vivant. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si les requins font partie des rares animaux qui existaient déjà à l'époque des dinos ; ils sont en quelque sorte un vestige de cet âge d'or du règne animal (j'ai rien contre les animaux d'aujourd'hui, mais les préhistoriques avaient ce petit plus titanesque qui force mon admiration).


Bon, arrivé à ce stade je crois que vous aurez compris que je ne vais pas vraiment parler du film ici, d'autres s'en sont très bien chargé sur SensCritique ou bien là : http://louvreuse.net/Analyse/les-dents-de-la-mer.html


Je trouve donc Les Dents de Mer excellent, mais ce qui m'intéresse surtout c'est le requin (Bruce, pour les intimes), tous les requins. Et il est triste de voir que ce film est si réussi (peut-on faire plus beau et plus flippant qu'un baigneur disparaissant au milieu de ses amis, alors que l'eau petit à petit devient rouge sang?) que les requins, qui se tapaient déjà une réputation pas terrible, sont devenus dans l'inconscient collectif l'équivalent des loups au moyen-âge : des concurrents à abattre.
Alors qu'il est avéré que les requins n'attaquent les hommes que très rarement, qu'ils n'attaqueraient en tout cas sûrement pas des baigneurs sur une plage de manière répétée, et que même s'ils le faisaient ce serait une bonne revanche contre les connards d'humains qui exterminent petit à petit tout leur garde-manger...
Attention hein, je ne dis pas que Les Dents de la Mer est responsable de toutes ces conneries, mais il contribue plus ou moins malgré lui au pire de l'humanité (et je ne parle pas de la mode des blockbusters estivaux, qu'il a contribué à instaurer).
Voilà, maintenant c'est clair : les moments que je préfère dans ce film sont ceux où on voit le requin attaquer ces crétins de touristes, ou même émasculer ce pourtant attachant vieux loup de mer. Mais voilà, le film me prive du happy ending que j’espérais, en dézinguant (de fort belle manière, certes) Bruce qui était pourtant un brave type qui ne faisait que son métier... Heu bon bref, tout ça pour dire que n'arrive pas à lui mettre plus de 8, tout en trouvant que sa moyenne est tristement basse.

youli

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