"Les deux cavaliers" est un western "intermédiaire" dans la carrière de John Ford qui ne ressemble ni à ce qu'il a pu faire avant, ni à ce qu'il fera après (L'homme qui tua Liberty valence, les cheyennes).
John Ford, lui-même, considérera que c'est "le pire film qu'il a pu faire en vingt ans". Il n'a pas aimé le scénario qu'il a pourtant fait réécrire.
J'ai tendance à opposer ce film à l'excellentissime "la prisonnière du désert" dont on pourrait aussi penser qu'il a voulu en faire un remake sur d'autres bases. Mais dans quel but ?
L'histoire est un peu la même, en plus ambitieux. Il s'agit d'aller récupérer des enfants ou des femmes kidnappées, il y a 5, 10 ans ou même plus, par des indiens dont le risque prévisible est de retrouver des gens qui auront perdu tous leurs repères et dont la réinsertion sera difficile voire impossible...
Il ne fonctionne pas très bien, le film, dès le départ. Pourtant l'idée d'un duo entre un shérif, McCabe, veule, cynique, cupide, paresseux joué par James Stewart et un militaire honnête, généreux, droit dans ses bottes Jim Gary (Richard Widmark) était bonne. Mais quelque chose cloche dans la relation entre les deux compères. La longue scène le long de la rivière sous-entend une relation profonde d'amitié entre les deux hommes alors que Jim Gary est obligé d'user de subterfuges pour convaincre McCabe et sera profondément écœuré par son comportement cupide.
Ensuite, la négociation entre McCabe et le chef indien Quanah joué par Henry Brandon n'est pas non plus très convaincante. Pour résumer, on a affaire à une négociation entre deux canailles toutes aussi cupides l'une que l'autre puisqu'on échangera (facilement) les captifs contre des armes. La bonne question est de se demander pourquoi devant autant de facilité, la récupération des captifs n'a pas été faite plus rapidement.
Du côté des acteurs, James Stewart donne l'impression d'être en roue libre tellement il cabotine et c'est très dommage.
Richard Widmark est bien plus fidèle à lui-même mais le contraste entre les comportements des deux acteurs est d'autant plus criant que l'un en fait des tonnes et l'autre parait éteint.
Finalement c'est du côté des actrices qu'on retrouvera (un peu plus) John Ford.
Shirley Jones joue le rôle de la sœur à la recherche du petit frère qui a été kidnappée il y a une dizaine d'années. La cour timide que va lui faire Widmark n'est pas sans intérêt et a des aspects touchants.
C'est surtout le personnage de Linda Cristal qui retient notre attention. En effet, il s'agit d'une jeune femme devenue l'épouse (ou l'esclave, c'est selon) pendant cinq ans d'un chef indien qui est récupérée par McCabe. Mais le retour vers la société des "blancs" s'avère très compliqué. Elle est désormais considérée par les autres comme impure ou souillée et ne reçoit que des marques de dégoût, en particulier de la part des autres femmes. Son personnage est réellement intéressant.
Tout n'est pas à rejeter, loin de là, dans ce western dans lequel on trouve quand même quelques accents fordiens dans le jeu des actrices mais aussi dans la mise en scène.
Pour être gentil, on va dire que ce film est une aimable parenthèse dans la carrière de John Ford.