Disons tout de suite que le titre français, stupide, a été donné par le distributeur pour essayer de faire passer le film pour une œuvre érotique, ce qu'il n'est pas du tout ! Le beau titre italien, La morte negli occhi del gatto, étant lui beaucoup plus représentatif du film. Réalisé par un des plus solides artisans du cinéma bis italien, Antonio Margheriti, Les diablesses fait partie des « derniers feux du gothique à l'italienne », titre fort pertinent du bonus joint à cette récente édition chez ciné2genre. C'est une œuvre hybride, tout comme son très curieux casting dû au fait que le film est une coproduction (Italie, France, Allemagne de l'Ouest) où interviennent donc des acteurs italiens, français et allemands. L'un des intérêts du film étant d'ailleurs que l'on y trouve le couple Birkin/Gainsbourg, elle dans le rôle principal, lui dans le rôle secondaire d'un inspecteur de police particulièrement désabusé. Le film est aussi hybride car il mélange la tradition du film gothique avec château, malédiction ancestrale, vampirisme, celle du giallo avec un meurtrier au rasoir et aux gants noirs, et enfin celle du policier dans la grande tradition d'Agatha Christie : de tous les protagonistes, qui est l'assassin, presque tous étant potentiellement susceptibles de l'être et, bien sûr, c'est celui auquel on s'attendait le moins (quoi que, si on fait un peu attention, il y a deux séquences clés au début du film qui peuvent permettre de le deviner). Bref, le film part un peu dans tous les sens et comporte même des éléments franchement inutiles, comme la présence de ce singe dans le château, qui n'est manifestement la que pour ajouter une référence supplémentaire à l'œuvre d'Edgar Poe (il en a déjà pas mal dans le film). Il ne tient guère par son intrigue, assez touffue et peu vraisemblable, mais surtout par la qualité de la très belle photo de Carlo Carlini et par une réalisation assez inspirée : décadrages, contre-plongées, mobilité de la caméra. Terminons par cette juste remarque d'Yves Gaillard sur le site objectif.cinéma : « Le film témoigne ainsi (…) de la posture paradoxale du cinéaste, presque unique dans les annales du cinéma populaire : à la fois artisan du médiocre, et commentateur lucide et un brin de dandy des errements hybrides du cinéma populaire (…) Il juxtapose ainsi, dans un grand mouvement ludique, un demi-siècle de topos de la production populaire, du singe meurtrier à la machination, de la belle héritière au détective nonchalant (…) ».