Pourquoi LES DIAMANTS SONT ÉTERNELS est une faute de goût ?

George Lazenby ayant raccroché sur un malentendu après Au service secret de Sa Majesté, honteusement sous-estimé, Sean Connery reprend le rôle de Bond pour un seul film moyennant de belles conditions financières (il faut dire qu'il avait été plutôt bien exploité pour les cinq premiers volets de la série). Sur le papier, cela semble au départ très prometteur, d'autant plus que le projet marque aussi le retour de Guy Hamilton, qui avait réalisé Goldfinger, ainsi que de son génial décorateur, Ken Adam, sans oublier Shirley Bassey pour la chanson-titre.

Mais les promesses ne sont pas tenues.

Les Diamants sont éternels est un film laid. Tout est moche et de mauvais goût : Les acteurs (Charles Gray affreux en Blofeld, Wint & Kidd, Willard Whyte, les seconds rôles), les costumes, Las Vegas et les bagnoles américaines. Même les décors de Ken Adam sont fades et peu inventifs. Connery a pris dix kilos depuis la dernière fois et il joue avec une telle nonchalance qu'il donne vraiment l'impression de s'ennuyer autant que nous. On dirait plus une participation qu'un rôle, il cachetonne en attendant que ça passe, blasé.

En fait, les choix décidés pour ce film n'ont jamais été à la hauteur. Seul le passage à Amsterdam sort un peu du lot. Pour le reste, le désert du Nevada manque cruellement d'exotisme pour un "James Bond". Las Vegas, avec ses casinos, ses cirques et son prétendu argent facile est la ville où se trouvent concentrées toute la vulgarité et la beauferie étasuniennes. Pas ce qu'il y a de plus glamour non plus, donc.

L'histoire n'est pas plus inspirée que les décors, c'est plat et les personnages pas particulièrement attachants et encore moins charismatiques. Même les scènes d'action - hormis celle de l'ascenseur à Amsterdam - sont poussives (c'est là qu'on regrette Peter Hunt), à l'image de la poursuite de voitures dans Las Vegas by night où l'on voit introduire un personnage de sheriff un rien neuneu qui préfigure l'abruti des deux films suivants. Visiblement, Guy Hamilton y tient. Et que dire de cet affligeant passage où deux astronautes bougent au ralenti pour simuler l'ambiance lunaire alors que tout le monde court à vitesse normale à côté d'eux ?

On ne compte plus les erreurs de mise en scène comme celle du type qui attend gentiment sur sa moto que Bond vienne lui sauter dessus. Et que dire aussi des incohérences stupides comme celle de déposer Bond dans un tuyau qui doit être enseveli durant la nuit ? Sérieux, c'est quoi le projet ? C'est bien l'absurde, mais c'est comme tout, il faut savoir le doser. Et là c'est franchement loupé.

Guy Hamilton a choisi la carte de l'humour direct, qui siéra plus à Roger Moore pour faire un divertissement comique (d'ailleurs Les Diamants sont éternels aurait pu être interprété par Moore, contrairement aux cinq premiers films). Le problème est que ce n'est jamais drôle. Et puis, après six films conçus sur un mode plutôt sérieux, celui-là heurte par son ton comique facile. Le contraste est énorme, et on ne sait comment l'aborder. Est-ce une parodie ? Néanmoins, la production a dû en être content puisqu'ils ont gardé scénariste et réalisateur pour les deux films suivants.

Finalement, il n'y a guère de joli que la frimousse de Jill St. John dans toute cette pellicule gâchée (mais elle est fagotée la plupart du temps avec des fringues immondes). Et on ne pourra manquer de préciser que John Barry a été le seul artiste à la hauteur en fournissant une excellente B.O., pas loin d'être aussi réussie que la précédente. C'est en fait la seule chose qui permette de tenir jusqu'à la fin.

Ce film montra que Sean Connery n'était pas si infaillible que ça en James Bond et qu'il vaut peut-être mieux un Lazenby dans Au service secret de Sa Majesté qu'un Connery dans Les Diamants sont éternels. Grâce à ce ratage et au premier remplacement par Lazenby qui a essuyé les plâtres, Roger Moore a tiré les marrons du feu et a pu reprendre le rôle en n'ayant plus de soucis à se faire quant à l'acceptation par le public d'un nouveau Bond ; du moins, sur le principe.

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le 27 nov. 2024

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