Sur le boulevard du crime, alors qu’on l’accuse d’avoir volé une montre, Garance (Arletty) se voit défendre par Baptiste (Jean-Louis Barrault), un mime qui parvient à plaider sa cause en pantomime. Mais par timidité, Baptiste n’ose avouer à Garance qu’il l’aime, et elle devient la maîtresse d’un autre acteur, Frederick Lemaître (Pierre Brasseur). Finalement, accusée à tort de complicité avec un criminel qu’elle a cessé de fréquenter, c’est vers un troisième homme qu’elle se tourne. Le poids des ans parviendra-t-il à effacer les regrets et les secrets inavoués ?
Comment parler aujourd’hui d’un des films – pour ne pas dire DU film – le plus emblématique du cinéma français ? Sa réputation n’est plus à faire, et finalement, un avis complet pourrait tenir dans le simple fait de dire que cette réputation est amplement méritée.
Si le casting s’avère d’une justesse totale, si la reconstitution et la mise en scène aussi sobre que fluide de Marcel Carné dynamise le tout pour nous assurer une immersion totale, c’est avant tout Jacques Prévert le véritable héros du film. Plus qu’à son scénario somme toute assez convenu, c’est avant tout à ses incroyables – et célébrissimes – dialogues, d’une poésie unique en son genre, que l’on doit au film d’être entré dans la légende du cinéma. A l’image de ces dialogues, Prévert apporte en outre un soin tout particulier à l’écriture de ses personnages, magnifiés par des acteurs lumineux, au sommet desquels l’immense Jean-Louis Barrault, des personnages hauts en couleurs, jamais caricaturés, et tous attachants.
Dès lors, on passe sans problèmes sur quelques faiblesses d’écritures et un léger manque d’émotion dans un final pas tout-à-fait au niveau du film, pour se laisser emporter dans ce long tourbillon exubérant et coloré (malgré le noir et blanc de l’image), drôle et poignant, sommet de poésie et de romantisme. Un fleuron de la culture française, dont les 3 heures apparaissent singulièrement courtes…