Sur le Boulevard du Crime passent les gens, et les nôtres apparaissent tour à tour ensorcelants, magnifiques. Sur le Boulevard du Crime, au soleil de Paris, les destins se lient comme le lierre à la treille ; les destins mêlés d'un dandy shakespearien, d'un mime au cœur tendre, d'une belle insouciante et d'un aigre forban...
Je m'immergeai dans ce film-fleuve, dans un XIXe impeccable, comme un Balzac sur une valse, foisonnant de tout ce qui composait l'ancienne société. Je l'aimais déjà, d'un amour latent... J'aimais déjà Frédérick et ses vers balancés aux nues, le Baptiste encore trop innocent, Pierre-François déclamant ses anathèmes contre la société... Et que j'aimais Garance, fille de la liberté, le genre que chacun adore mais que personne n'a jamais vraiment... et son sourire – elle sourit tout le temps – qui réchaufferait cinquante lunes, sur son visage illuminé dans les ombres de la nuit... Que d'images... J'aimais Paris aussi, et j'aimais le cinéma.
Et pendant trois heures que je voulus éternelles : la vie. Les rencontres et la solitude, la tristesse et l'amour, les chemins tracés dans le temps et dans les climats du siècle. Toute une fresque, intelligente et profonde, offerte pour nous, pauvres médiocres devant cela, et pour l'histoire du cinéma qui jamais n'aura le droit de l'oublier.
Sans la plume d'un Prévert, touché par la grâce dans les dialogues de ce film, j'ai tenté de sceller ma première impression, qui sans doute sera la dernière : celle d'avoir vu une œuvre qui tutoie les cimes.