Poésie du coeur
Critique+images Les étoiles restantes est à mes yeux un OVNI dans le cinéma français d’aujourd’hui. Un cinéma qui se recycle avec ses comédies dont on ne voit plus la fin et dont on se lasse...
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le 30 avr. 2018
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Parce que le plaisir en matière de cinéma repose en bonne partie sur la surprise, se laisser entraîner par une cinéphile un peu fantasque voir un petit film français confidentiel dans une des rarissimes salles parisiennes qui le projettent n'est jamais une mauvaise idée.
Deux salles, en l'occurrence. Et pas les plus fréquentées, hein. Quel que soit le film, ça fait toujours mal au cœur (surtout quand on vient de voir The Disaster Artist, sorti la même semaine en France !). Attention, nulle question ici de perle criminellement ignorée : Les Étoiles restantes n'a RIEN d'un grand film ; mais d'une part, il est bien plus méritant que bien des merdes françaises diffusées dans cinq-cents salles, et d'autre part, si le film de Loïc Paillard n'a rien d'exceptionnel, il a le mérite de « rester en tête », comme l'a très justement formulé un gars de Première.
Ce qui empêche ce premier long-métrage d’être réussi, explique peut-être sa confidentialité, et justifie que nous en parlions malgré tout sur SC, c’est qu’il est tristement inégal. D'un côté, toute ce qui concerne le père du héros, en phase terminale de cancer, et la petite thérapeute impudique qui se retrouve entre les deux, Manon (incluant donc tout le segment Finistère), est aussi divertissante que touchante ; de l'autre, on oublierait volontiers toute la partie colocs, c'est-à-dire des scènes entre le personnage principal Alexandre et le demeuré Loris, où le cinéaste s'est visiblement pris pour Judd Apatow et viandé à l'exercice de l'humour absurde de fumeur de beuh – l’interprète du coloc Sylvain Mossot a bien essayé de donner corps à son personnage improbable, c’était mission : impossible. On pourrait presque parler de schizophrénie. La petite prétention intellectuelle du cinéaste lui a inspiré autant de jolis traits de poésie (« elle aurait pu être dans un poème de Baudelaire, elle a choisi d'être dans ma vie ») que de répliques ampoulées dignes du pire film d’auteur parisien. On voyait du potentiel dans le personnage d'Alexandre, trentenaire stagnant et dépressif, mais Paillard en a fait un sale con dont le comportement agressif vis-à-vis du personnage de Manon est mal justifié. Son interprète Benoît Chauvin, croisement un peu agaçant de Matthieu Amalric et de Pierre Richard, n’aide pas vraiment avec une performance elle aussi mi-figue, mi-raisin, juste dans ses scènes avec le père, à côté de la plaque dans ses scènes avec Manon (qui le traite assez justement de sale con à plusieurs reprises, d'ailleurs...). En somme, moments touchants et moments horripilants s'enchaînent, et le film est bien trop court (1h20 !) pour que l'on se prenne à imaginer une version courte expurgée du personnage de Loris.
L'emballage de ce spectacle un peu frustrant ne convainc, lui aussi, qu'à moitié : Paillard s'avère moins bon réalisateur (ça manque d'ampleur et c’est criblé de clichés du répertoire) que chef opérateur (certaines scènes ont de la gueule, comme celle de la scène d’amour avec l’ensorcelante révélation Camille Claris). Avant d'apprendre que le cinéaste a porté les deux casquettes, on remerciait le chef op' d'avoir sauvé les meubles ! Du coup, merci, Loïc Paillard... et aussi, non merci ?
Mais ne soyons pas trop durs. Frustrant ne veut pas dire mauvais, et l'on revient au commentaire de Première, et aux qualités indéniables de ce petit film qui mérite quand même un coup de main. Dans ses beaux moments, avec l'aide de l'excellent Jean Fornerod en père agonisant, Les Étoiles restantes fonctionne plutôt bien, au point d'émouvoir, même, vers la fin. Oui, quand il est inspiré, il s'élève un cran au-dessus du lot. Sa fin optimiste, prévisible dans ce genre de récit censément cathartique, ne convainc pas entièrement, comme c’est généralement le cas des remontées de pente trop faciles au cinéma, mais l’attachement au personnage de Manon, ainsi que le message que porte le beau personnage du père, incline à la tolérance. Et puis, insistons à propos de Camille Claris : cousine, t'as intérêt à réapparaître à l'écran illico, même habillée, s'il doit en être ainsi...
Note : le cinéma où nous avons vu le film est le Lucernaire, vieille bâtisse perchée dans le sixième arrondissement, intégrée à un bric-à-brac qui comprend un bar à la bonne franquette, une salle de théâtre, et un restaurant à la cuisine très correcte.
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le 11 mars 2018
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