Bourreau des corps
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Drame et thriller s'entremêlent dans ce film ambitieux qui tente de naviguer les eaux tumultueuses de la justice et de la vengeance. Malgré une réalisation parfois maladroite et une exposition trop longue, il pose des questions pertinentes sur la quête d'humanité au-delà des atrocités.
2014, Saidnaya, Syrie. Hamid est relâché de la prison après avoir subit les pire sévices et tortures de la part des agents du régime. Deux ans plus tard, il trouve refuge à Strasbourg, où il recherche un certain Hanni.
Cette histoire s’inspire librement de divers cas de tortionnaires syriens réfugiés en Europe et traqués par des opposants eux-mêmes réfugiés. On se rappelle l’ex-colonel Anwar Raslan, condamné à la perpétuité par un tribunal allemand en 2022, grâce au principe de « juridiction universelle ». En adoptant le point de vue d’une victime traumatisée et obsédée par la recherche de son bourreau, Les Fantômes combine les codes du thriller d’espionnage et ceux du drame social pour illustrer les stigmates de la violence extrême. Un concept intéressant en théorie.
Malheureusement, cette approche prometteuse est plombée par de nombreuses maladresses et lourdeurs. Jonathan Millet, réalisateur issu du documentaire, peine tellement à insuffler de la sincérité à ses images qu’il se sent obligé de préciser dès le début que son film est labellisé « inspiré de faits réels ». Dès le prologue, un plan très théâtral montre des prisonniers déambulant tel des zombies dans le désert. Ces notes d’intention surlignée au stabilo se perpétuent dans le film, avec un personnage principal réunissant tous les clichés de l’opposant idéaliste (jeune professeur de poésie, femme et fille tuée par le régime…) et une bande-originale d’atmosphère écrasante afin de rendre compte du stress et de la confusion d’Hamid.
Pendant les deux tiers du film, il est ainsi difficile de s’intéresser à ces personnages unidimensionnels et cette chasse aux criminels de guerre planqués, caractérisée également par un manichéisme simpliste. Cela d’autant plus que la traque en question frôle le ridicule dans sa mise en scène oubliant tout souci de plausibilité ou de répétition. On retiendra toutefois ces scènes étranges et troublantes sur des chats de jeux vidéo où les traqueurs partagent leurs informations tout en jouant à la guerre.
Heureusement, le dernier acte sauve quelque peu le film en amenant enfin un peu de nuance et de complexité. Soudain, on se met à réfléchir sur les notions de justices et de vengeance et la caméra scrute également les humains qui se cachent derrière les bourreaux. Et comme par miracle, le film offre un final très élégant donnant tout son sens à son titre.
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le 28 juin 2024
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