Aki Kaurismäki maîtrise l'esthétique avec brio dans Les Feuilles Mortes grâce à une caméra fixe qui met en lumière des personnages communs. L'alchimie naturelle entre notre pseudo couple est palpable alors qu'ils errent, travaillent, se rencontrent, se séparent, et vivent simplement leurs habitudes. Il ne met pas en avant des aspects particuliers de ses personnages, mais simplement eux, leurs habitudes, les choses simples de la vie, et dépeint leur authenticité. Le jeu des acteurs est juste et n'est jamais dans la démesure, au contraire, dans le sens où une expression est suffisante pour transmettre l'essence des émotions au spectateur.
Les clins d'œil et les références disséminées à travers le film ajoutent du caché notamment à travers les nombreuses affichent de cinéma proposées ici et là dans les bars enfumés où ça boit à ne plus en compter les verres et où chaque personne ne semble n'être qu'un corps dénué d'âme, le tout créant une atmosphère où l’existence est teintée de mélancolie.
La précarité est exposée avec réalisme, il n'hésite pas à montrer les difficultés et le travail auxquels font face nos protagonistes, en mettant en avant les conditions déplorables, tout en restant rationnel. C'est là toute la beauté de ce film. Aki met en scène la vie de nos personnages sans ne jamais tomber dans le mélodrame.
Malgré la difficulté à subvenir à leurs besoins, ils vivent. Ils sont sans cesse confrontés à leur patron, ayant une emprise sur eux, comme si leur vie dépendait de lui, symbolisant la lutte pour leur survie. Entre celui qui ne gère que les comptes, et l'autre qui regarde et ordonne son employée à faire la plonge, entre l’indifférence brutale et la passivité apparente.
La ville déshumanisée devient le théâtre où la vie et l'espoir semblent résider uniquement dans les liens tissés entre les personnages. Les Feuilles Mortes est une œuvre poétique qui capture la simplicité de la vie et célèbre la résilience humaine face à l'adversité.