Sorti en 2019 et réalisée par Greta Gerwig, Les Filles du Docteur March est l'une des nombreuses adaptations du roman de Louisa May Alcott (Little Women). Comparé à la précédente adaptation de 1994 avec Winona Rider, Christian Bale et Kirsten Dunst, que j'aime beaucoup, cette nouvelle version déçoit quelque peu, sans être dénuée de certaines qualités. La direction artistique, la cinématographie et les costumes sont irréprochables. Par contre, j'ai trouvé que la direction d'acteurs et les personnages sont assez fades dans cette nouvelle version.
L'histoire prend place aux Etats-Unis, entre 1861 et 1865 pendant la guerre de Sécession. En ce temps de guerre, quatre jeunes sœurs issues de la classe moyenne font face aux difficultés de la vie quotidienne. Les quatre filles du docteur March, pasteur nordiste engagé comme aumônier durant le conflit, ont toutes une personnalité bien marquée, Meg (Emma Watson) qui est la plus raisonnable, Jo (Saoirse Ronan) qui est l'intrépide, Beth (Eliza Scanlen) qui est la plus charitable et Amy (Florence Pugh) qui est la plus orgueilleuse. Elles vivent seules avec leur mère Marmee (Laura Dern). Autrefois riche, la famille doit faire face à des difficultés financières et à des dettes. Malgré tout ça, l'absence du père et la pauvreté, toute la petite famille vivent heureuses, font toujours preuve de bon sens, de générosité et de bienveillance et n'oublient pas d'aider plus pauvres qu'elles.
Comparé à la version de 1994 qui optait pour une narration plus classique, le film de 2019 adopte une narration non linéaire, en alternant sans cesse entre le présent et le passé. Je trouve aussi que le rythme est plus rapide et que le film est trop bavard. J'ai l'impression que Greta Gerwig a voulu transposer tel quel, tout le roman dans le film, sans faire de choix. Résultat, le film ne nous laisse jamais le temps de nous attacher aux personnages. 2h15 c'est vraiment trop peu pour raconter une histoire écrite sur plus de 500 pages et il aurait fallu faire des choix. L'exemple le plus frappant est le personnage de Beth qui meurt à la fin. Le film ne nous permet jamais de nous attacher au personnage et d'être ému par sans disparition, car on la voit trop peu à l'écran. Et quand on lui accorde un peu de temps de présence à l'écran, c'est juste pour jouer du piano et rien d'autre. Dans la version de 1994, sa relation avec Jo était bien plus développée, montrant qu'elles ont une réelle alchimie et que l'une s'accorde avec l'autre, ce qui rend leur dernier dialogue juste avant sa mort particulièrement touchant. On s'attachait à ce personnage aussi car on suivait une ligne temporelle, certes plus classique, mais qui laissait plus de place à l'émotion.
Pour revenir à la narration non linéaire, il y a une différence de colorimétrie qui permet fort heureusement de s'y retrouver assez vite. Toutes les scènes dans le passé sont dans des couleurs beaucoup plus chaudes et à l'inverse le présent adopte des couleurs plus froides. Même au niveau de l'étalonnage ça se voit et du coup je n'ai pas été perdu lorsqu'on passe d'une ligne temporelle à une autre (le passé et le présent). Le personnage de Jo semble être inspiré de l'autrice elle-même et on peut donc considérer qu'il s'agit d'une autobiographie romancée. Le film nous montre clairement que ce n'est pas une histoire vraie. Même si l'histoire est basée sur la vraie vie de l'autrice/Jo, elle nous montre une fiction, sans tenter de faire passer son histoire pour la réalité. C'est dit explicitement dans la scène de fin lorsque Jo discute avec l'éditeur. Dans cette scène, qui par ailleurs peut paraitre extrêmement mièvre, Jo nous dit clairement que nous sommes dans une histoire fictive écrite par l'autrice.
Mais voilà, là où la comparaison fait mal avec la version de 1994, c'est au niveau de l'acting et de l'alchimie entre les acteurs. Mis à part Florence Pugh qui est parfaite dans le rôle d'Amy, tous les autres acteurs/personnages paraissent bien fades. Ne serait-ce que la relation entre Laurie/Timothée Chalamet et Jo/Saoirse Ronan qui ne prend jamais, alors que dans la version de 1994, l'alchimie entre Winona Ryder et Christian Bale est évidente. Et puis, le film de Greta Gerwig est extrêmement bavard et laisse peu de place aux émotions. A force de vouloir tout expliquer/expliciter et tout souligner au gros feutre rouge, on se désintéresse totalement du sort des personnages.
Au final, je n'ai pas détesté cette nouvelle version, je l'ai même plutôt appréciée. La direction artistique est très soignée, en atteste l'Oscar reçu pour les meilleurs costumes, mais si je devais conseiller une version, ce serait quand même celle de 1994.