Les Garçons et Guillaume, à table ! par Léopold Pasquier
Guillaume Gallienne adapte sur grand écran sa pièce de 2009, " Les Garçons et Guillaume, à table ! ", soit le récit d'un malentendu invraisemblable : durant sa jeunesse, il fut entendu pour tous que Guillaume était homosexuel. Mais l'est-il vraiment ?
On identifie très vite le principal souci de ce film : Guillaume Gallienne ne sort jamais de son texte. Entre anecdotes cocasses et psychanalyse sur le pouce, Gallienne s'en tient au cahier de charges de son one man show autobiographique. Résulte l'impression d'un film sans débordement, balisé par une voix off omniprésente, style bateau mouche presque. C'est bête à dire mais Guillaume Gallienne semble oublier faire du cinéma. Certes le texte est mordant, il est surtout trop riche à la base. Le faire rentrer entier dans le film, ce n'est pas laisser beaucoup de place au reste. Voir à ce propos la mise à nue finale: Gallienne retourne à la scène et à son spectacle comme à l'essentiel et enterre ce qui reste de cinéma sous un dernier monologue péniblement démonstratif.
Reste à Gallienne un talent certain pour la comédie dont les origines coïncideraient - le film nous l'explique - avec sa volonté de devenir femme. Jeune, Guillaume collectionne chez ses modèles féminins les attitudes, les tics de prononciation qui constituent aujourd'hui le répertoire maniériste qu'on lui connait. Comique de manière précisement, la mièvrerie too much du personnage est désopilante non pas parce qu'il est gay, mais justement parce qu'il joue le gay; parce que Guillaume croit en son homosexualité postiche. Comprendre une passion (très française) pour le cliché. Après tout, le problème derrière le malentendu du film - l'amalgame - c'est aussi celui de la comédie en France. Il suffit de voir l'obsession française à penser la virilité jusqu'à la caricature (au pif: Les infidèles) pour se rendre compte à quel point la comédie française n'entretient avec son sujet qu'un mâché de stéréotypes se regardant de l'intérieur. Guillaume Gallienne est donc bien un gag français: quelques allusions de sa mère suffisent et le voilà rejouant allègrement 'La cage aux folles'.