Autant l'admettre : je ne suis pas aisément amusé. Il en faut plus qu'une série de blagues consensuelles pour enfants de six ans prononcées avec entrain sur fond vert par un ramassis d'acteurs de seconde zone pour me faire rire. Je n'ai rien contre l'humour absurde, hein, mais ce type très particulier de discipline nécessite une forme de volonté dans le ridicule que les divers professionnels ici réunis ne sont plus à même d'atteindre depuis des années. (Vous remarquerez – du moins, si vous en êtes encore capable – que la plupart du temps l'on ne peut pas être drôle, très très très bien bodybuildé et en plus prétendre être sexy ; un fait dont Jim Carrey s'est bien rendu compte lors des points les plus bas de sa carrière.) Remarquez... je sais qu'il est impossible d'attendre d'un cinéma pour les petits enfants et les adultes qui les accompagnent d'avoir une volonté humoristique poussée au niveau des classiques de la discipline. Vous ne verrez plus jamais les sommets intellectuels des Monty Python éclairer les cinémas du monde entier. L'intelligence ? C'est fini. Les bons mots ? Faudrait que le public les comprenne. Non, autant s'y faire : nous sommes devenus la civilisation du soi-disant random savamment calculé, des explosions en 3D et autres acteurs autrefois comiques payés une somme raisonnable pour remplir le rôle de protagonistes musculeux dans des produits mondialisés destinés à ratisser un public le plus large possible. Bienvenue au XXIème siècle, une dimension où la médiocrité règne sans partage.
Il me semble – et vous pouvez commencer à m'envoyer des tomates – que les Gradins de la Galaxie sont très nettement une tentative de recréer le succès de Star Wars sans s'encombrer de tous ces périlleux concepts philosophiques prémâchés qui ont pourtant fait une portion non-négligeable de l'aura mythique de la série. C'est une expérience de clonage réalisée en laboratoire qui vous est ici présentée comme un film. Pendant des années, sous une infusion régulière de bons dollars américain, l'on a pris une formule très générique – celle du serial de science-fiction du début du XXème siècle – pour en faire un produit lisse et sans aspérité où des archétypes bidimensionnels peuvent réciter des dialogues digne de sit-coms tout en faisant la publicité de divers jouets dont votre petit frère aura envie. Vous avez – dans l'ordre – votre ersatz de Han Solo, un Chewbacca végétal, le personnage en images de synthèse qui fait des blagues, une femme verte dans la grande tradition de Star Trek jouée par l'une des actrices du reboot de Star Trek... et une version un peu moins coûteuse du Rock. (Je sais que l'Animal fut Champion WWE six fois – si l'on compte le fait que les deux titres principaux de la compagnie ont été fusionnés ces dernières années – mais ne pensez pas qu'il soit ici présent pour ses capacités dramatiques : ils avaient juste besoin d'une montagne de muscles capable de mémoriser ses dialogues et de tenter de faire des blagues en poussant le fameux rire forcé qui fit de lui un main-eventer.) Rajoutons à tout ceci le fait que l'Univers Marvel avait désespérément besoin d'un point d'entrée modique pour leur produits intergalactiques et l'on comprend soudain pourquoi la formule est aussi aisée à analyser.
Tiens, mais c'est qu'avec tout ça je n'ai même pas encore commencé à causer du film. Ne vous inquiétez pas : cela va aller vite, le film est très simple. Tout commence dans une approximation pas très convaincante des seventies où un clone tridimensionnel de Kurt Russell conte fleurette à une donzelle tout en lui montrant un McGuffin eucaryote qui servira très certainement à détruire l'univers d'ici la fin du long métrage. Zoom, pfwoh, les Gradients de la Galaxie sont pris dans une séquence introductive générique où ils doivent défendre des McGuffin d'une attaque de monstres de l'espace tandis que – oh, surprise – la scène devient un long faux plan-séquence où un produit dérivé en 3D danse de manière kro mignonne face caméra tandis qu'il se passe quelque chose derrière lui. Le tout est plat, sans saveur et sent son fond vert à trois kilomètres. Après ça, bang, ils sont poursuivis car Fox McCloud a volé les batteries. (Il est incorrigible, lol.) Mais, aha, nos intrépides décalques sont sauvés par... Kurt Russel ! Il est vieux, ouaiiiis ! Mais, oh non, il les invite sur sa planète et l'on comprend petit à petit qu'en fait – ne faites pas semblant d'être surpris – il est une force immortelle néfaste et que son fils doit choisir entre réprimer un bâillement, accepter son héritage céleste ou continuer à avoir un job dans une série de films de science-fiction destinée à un public doté de l'âge mental d'un enfant de six ans. Sans surprise, il décide d'honorer son contrat avec Disney et tout se termine pour le mieux quand il tue son papa avec l'aide de ses amis. Ah, et il est amoureux de Gonorrhée – la dame verte et accessoirement la fille du méchant du prochain Avengers - comme ça l'on est certain que le rouquin autrefois gras mais aujourd'hui transformé en star susceptible de rapporter de l'argent par le pouvoir de la salle de sport est bien hétérosexuel. L'on ne voudrait pas qu'un doute l'habite... ou même l'inverse. #EasyJokes
Remarquez le film passe assez vite – le tout est très bien rythmé – et donne l'illusion que quelque chose se passe pendant qu'on le regarde. Je crois que c'est l'effet de la musique et du montage, en fait, c'est plus ou moins construit comme une version publicitaire de la manière dont Tarantino utilise la musique dans ses productions. Sauf qu'ici, paradoxalement, pour un long-métrage censément doté d'un Awesome Mix... vous avez quoi ?! Une bonne chanson, maximum.
Et encore, c'est un titre mineur de George Clinton. C'est normal, d'ailleurs, un meilleur morceau coûterait trop cher.