Les Héroïques commence par un monologue puissant, qui prend aux tripes, même si on a tous déjà rencontré ce type de personnage en littérature, au cinéma, voire dans son propre entourage. Michel s'affiche avec un blouson orné dans le dos de l'inscription "loser." Auto-dérision mais aussi lucidité d'un homme qui doit se relever de ses lourdes addictions et qui, à 53 ans, ne doit pas oublier son père malade et ses deux fils, un bébé et un adolescent. C'est beaucoup pour un seul homme et le ton du film est dur, enchaînant des scènes de galère avec un minuscule espoir de sortir du noir du tunnel. Michel doit enfin grandir, tout le monde le lui dit, et tout l'enjeu du film est là, entièrement centré sur lui, beaucoup trop d'ailleurs, n'offrant que peu de contrepoints avec les autres et notamment avec les femmes qui auraient pu apporter une autre perspective, surtout qu'elles sont incarnées par Clotilde Courau et Ariane Ascaride, d'une impeccable sobriété. François Creton est sans cesse à l'écran, souvent agaçant par ses postures et son parler verlan, mais aussi attachant et réel (Les Héroïques s'inspire énormément de sa vie). Un pied dans le documentaire, un autre dans la fiction avec des acteurs professionnels et amateurs, le film tend vers le cinéma de Loach et de Guédiguian mais son absence de fluidité ou même d'humour le dessert.