Et pourtant, on a connu quelques grands moments de cinéma avec les œuvres de Félix Van Groeningen, que l'on repense au bouleversant My Beautiful Boy (on ne s'en est jamais vraiment remis) ou au tragique Alabama Monroe. Alors pourquoi, en ce Festival de Cannes, Le Otto Montagnes ne nous a pas fait partager l'engouement de la presse à son sujet ? Parce qu'il nous a paru davantage tenir de la longue balade pépère sur sentier connu, que de la découverte aventureuse, voire hasardeuse, mais définitivement riche en émotions. On s'est laissé prendre au jeu avec la première (courte, beaucoup trop courte) partie avec les deux petits garçons qui partagent leurs connaissances sur les montagnes, jouent comme deux frères et se promettent une retrouvaille par an jusqu'à la fin de leur vie, un postulat qui nous a fait fondre comme neige au soleil et dont on espérait vraiment beaucoup. Malheureusement, ce que le film fait de cette promesse n'a rien d'affriolant : voici que les deux versions adultes se croisent chaque année pour discuter le bout de gras, changer une ampoule, apprendre le ski, traire les vaches... Une petite balade champêtre qu'on aurait aimé (L'Amitié est dans le pré ?), si seulement elle ne faisait pas 2h30... On a cru mourir d'ennui dans les moments les plus lents, perdus dans ce scénario pantouflard qui semble ne pas savoir ce qu'il cherche dans cette amitié annuelle, et la fin qui décide enfin d'apporter un peu de drame à l'ensemble nous aura fait lever une paupière in extremis. On ne sera pas davantage conciliant avec le discours sur la place du père, aux abonnés absents pour son propre fils et pourtant très protecteur envers l'ami du fiston, une piste scénaristique qui aurait pu rejoindre celles déjà explorées des pères de My Beautiful Boy et Alabama Monroe, mais que le film abandonne bien vite pour ne la faire revenir qu'à la dernière minute. L'ouverture avec les enfants nous a bien plu, les plans naturels également (dans cette vallée montagneuse si belle), le charme des habitants des hauteurs a fonctionné, mais la longueur couplée au scénario sans idée forte nous a plongé dans l'ennui, in extremis sauvé par une fin facile (ultra-prévisible) mais à la belle morale pour les frangins de cœur du monde entier. Bro-back Mountain.