Les initiés n'est pas encore sorti en Afrique du Sud mais fait déjà beaucoup réagir car il évoque deux véritables tabous, l'un concernant les rites d'initiation de la culture xhosa, l'autre l'homosexualité, sujet épineux dans une société qui ne veut pas en entendre parler quand elle ne la combat pas frontalement. Ajoutez à cela que le réalisateur est blanc et son acteur principal un chanteur qui ne cache pas ses orientations gay et il n'y a rien d'étonnant à ce que les réseaux sociaux sud-africains soient partagés entre louanges pour le courage de montrer et invectives voire menaces de mort. Vu d'ailleurs, c'est à dire d'ici, et étant donné que le film se passe entièrement dans une communauté close, en forêt, entre instructeurs et initiés, il y avait le danger de scruter le pittoresque du sujet avant de s'intéresser au fond des thèmes traités. John Trengove a évité l'écueil par une mise en scène convulsive, parfois agaçante quand elle est principalement à l'épaule, mais qui se marie bien avec un scénario qui déconstruit la linéarité, s'échappant dans des instants poétiques, finement filmés. Reste qu'il y a une violence prégnante dans ces rapports entre hommes qui semblent tous interroger la masculinité de chacun en se défiant ou en se combattant. Le désir, lui-même, ne peut se résoudre à être synonyme de révélation ou de tendresse mais passe par une lutte également morale. Les initiés est loin de ce qu'on pourrait appeler un film aimable, il est tendu, âpre et sauvage. Avec le maquillage blanc que portent le plus souvent les garçons en cours d'initiation, on pourrait presque employer le terme de primitif.