Une réalisation qui se heurte à l'écueil du réel : Sabine de Barra eût-elle existé, on eût su gré à l'acteur et réalisateur Alan Rickman d'arracher à l'oubli cette figure féminine de jardinière géniale, renouvelant le style d'André Le Nôtre et abreuvant son inspiration d'une eau nouvelle, à l'occasion de la création des jardins de Versailles. On eût pardonné les anachronismes commis par les décorateurs, les impossibilités chronologiques et les âges invraisemblables dictés par le scénario ; tous écarts dénoncés avec beaucoup de pertinence par Clint Langueur ; "Clint", tant l'ami Fritz se montre ici avec une gâchette aussi sensible et un viseur aussi ajusté que le héros d'"Impitoyable" :
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Il n'empêche : Mme de Barra eût-elle existé, on eût écarté ces défauts formels pour ne recueillir que la beauté des décors, la somptuosité des tissus, le rêve d'une belle histoire d'amour, la subtilité des dialogues et la performance des trois acteurs principaux : le roi Rickman, grave et cérémonieux à souhait, Kate Winslet, en femme douloureuse et marquée mais irradiante d'un charme naturel et d'une fraîcheur résistant à l'adversité ; Matthias Schoenaerts, enfin, le visage adouci par ses cheveux longs et campant un Le Nôtre aussi sensible que réfléchi.
Lorsque, vérifications faites, on s'est assuré de l'inexistence effective de cette irrésistible Mme de Barra, le jeu des perspectives se retrouve incontournablement modifié et l'on ne peut se défendre d'être frappé par le caractère très prévisible et convenu de la passion représentée, par la banalité, aussi, de la rivalité féminine qu'elle suscite et par l'invraisemblance, au bout du compte, d'une ascension et d'une reconnaissance auxquelles on aurait voulu pouvoir croire...
Reste toutefois comme le regret d'un rêve et une forme de gratitude à l'intention du réalisateur, pour avoir ainsi œuvré à donner forme à une romance au demeurant très féministe, au seuil ultime de son existence.