Divorce à la roumano-franco-italienne
Il y a des films, comme ça, sur lesquels on laisse reposer tous ses espoirs, la faute à ce bon Raisin qui termine si joliment sa critique et qui l'a rajouté à ma liste d'édification, la faute à mes éclaireurs aussi, qui n'osent presque jamais glisser sous le sept, et puis Bébel en 1971 avec Jobert, moi je dis oui tout de suite, j'enlace, j'en redemande, je suis même confiant pour Rappeneau, aveugle à tout, optimiste béat, j'avais déjà presque fait le film dans ma tête, avec les deux tourtereaux perdus dans les guerres révolutionnaires, ça bondissait de partout, les répliques les plus cocasses fusaient à cent à l'heure, la photographie était soignée comme les costumes, il n'y avait pas de temps mort mais on se caressait tout de même par nos vices préférés au coin d'une soirée d'auberge ou d'un bivouac tendre... Je crois que j'en avais même fait deux ou trois rêves un peu cochons, il faut me les pardonner, je voulais tellement y croire.
Et puis comme ça, un jour, il y en a cinq, dans un magasin de seconde main quelconque, je trouve un coffret magnifique pour deux franc six sous, même que la vendeuse accorte avait caché le prix tout à fait à l'intérieur, rapport à pas abimer la jaquette un peu douce, même que j'ai failli l'embrasser rien que pour ça, j'y ai vu les meilleurs augures.
Après, le souci, c'est que le film est gentil comme tout, presque charmant, mais que du rêve promis, il ne reste que les miettes, cachées derrière une photographie horrible, une reconstitution de téléfilm malgré l'apport d'Alexander Trauner (du coup, il y a tout de même un ou deux chouettes décors à sauver, dont un très bel escalier, c'est toujours ça...) et une réalisation largement poussive qui n'aide pas à emporter l'histoire au-delà du grand n'importe quoi général.
Ca sent vraiment le tournage franco-italo-roumain bordélique, trop long, désordonné, trop de figurants inutilement, trop brouillon, rien de maîtrisé, rien de rigoureux... et pas assez de fraîcheur derrière pour compenser.
Avec ça, on n'est pas aidés par le casting de huitième zone où Sim semble faire figure de moindre mal. Un Sami Frey abominable qui s'appelait encore Frei, Patrick Préjean, Charles Denner, Michel Auclair, George Beller ! L'imagination s'égare tellement qu'à la toute fin, j'ai même cru apercevoir Patrick Dewaere en soldat de l'an II...
Bon, heureusement, reste Pierre Brasseur pour rattraper tout ça, mais c'est tellement dommage de gâcher un film de cette manière...
Le couple principal, heureusement, même en petite forme, suffit à sauver le film de la noyade, Bébel est un peu endormi mais reste le point fort du film et Marlène arrive presque à faire oublier un jeu hésitant et des coiffures abominables par le charme de on personnage de petite peste. Ils sont mignons en plus, ils passent le film à essayer de divorcer, c'est sympatoche comme tout.
Alors, voilà, ça passe, ça dure une heure et demi, même sans rythme, on pardonne beaucoup, et puis, c'est tellement gentillet comme film qu'il est absolument impossible de se fâcher réellement avec lui.