Dasse Baute
René Clément n'est pas n'importe qui au sein du cinéma français, c'est le moins que l'on puisse dire, notamment après le visionnage des Maudits. Ce semi-huis-clos à l'intérieur d'un U-Boot, troisième...
Par
le 14 juil. 2013
12 j'aime
C'est la deuxième fois que je vois ce film. J'avais été très déçu la première fois. En le revoyant, j'ai un peu mieux apprécié.
René Clément au début de sa carrière s'était spécialisé dans de brillants documentaires. D'ailleurs un de ses premiers long métrages "la bataille du rail" tenait beaucoup du documentaire. Ici, il utilise un peu la même technique avec la voix off d'un des acteurs, Henri Vidal.
Le scénario possède un potentiel énorme. En effet, un U-Boat allemand quitte Oslo fin avril 1945, dans les derniers jours de la guerre, avec diverses personnes – nazies – allemandes, françaises, italiennes (hommes et femmes) pour continuer la guerre en Amérique du Sud. Le besoin d'un médecin se faisant sentir dans le sous-marin, à l'approche des côtes françaises, l'équipe va kidnapper un médecin français à Royan. Ce dernier va ainsi accompagner ces personnes hautement recommandables pendant toute la traversée. On voit tout de suite tout ce qu'on peut tirer d'un tel scénario : la vie en huis-clos dans un sous-marin, les relations entre des gens lâches, salauds, fanatiques ou simplement obéissants, la gestion de la nouvelle de la mort de Hitler et de la fin de la guerre qui ne peut que diviser, la position politique de l'équipage, etc … Au lieu d'un film d'une heure et demie, on pouvait attendre une vraie fresque qui aurait développé plusieurs axes de lecture …
Comme je disais plus haut, René Clément a pris le parti de raconter par la bouche du médecin français, qui se trouve en position de témoin, l'histoire avec une voix off. L'intention de René Clément n'était peut-être pas de faire comme un documentaire mais plutôt comme un film noir. Mais ce choix me parait casser la dynamique du film dans la mesure où ce qui est dit ne correspond qu'à ce que le toubib voit et comprend. Il me semble que là, le film aurait pris une autre dimension en rendant les actions des uns et des autres plus indépendantes et en positionnant le spectateur en témoin de l'action.
Les qualités du film sont essentiellement la technique certaine de René Clément pour rendre compte de l'atmosphère étouffante et claustrophobique du sous-marin. Les scènes très réalistes sont tournées dans une réplique en bois exacte et grandeur nature du sous-marin monté sur ressorts ou vérins pour simuler le roulis ou les mines qui explosent à proximité.
René Clément montre à plusieurs reprises une vraie élégance et un savoir-faire dans certaines scènes comme la mort de Dalio poignardé derrière un rideau qui se déchire entrainé par le cadavre (Hitchcock semble s'en être inspiré dans "psychose") ou la fin peu glorieuse de l'allemande nazie qui veut s'échapper du sous-marin ou la scène dans le hangar de sacs de café …
Le casting est basé sur plusieurs acteurs qui s'avèrent très bons dans leur genre.
Henri Vidal qui est le médecin kidnappé et entrainé dans cette aventure joue très bien son rôle nonobstant le choix de Clément d'en faire le narrateur dont je parlais tantôt. Il est bien sûr le bon de cette histoire, le témoin privilégié.
Michel Auclair joue une espèce de jeune petite frappe franco-allemande au service d'un gestapiste fanatique (joué par un inconnu Jo Dest au physique prédestiné) qui finit par prendre le contrôle du sous-marin. Une relation très ambiguë relie les deux hommes qui contribuent à une ambiance de soupçon et de terreur.
Marcel Dalio, qu'on voit peu, joue le rôle du contact argentin qui se défile car l'heure est à la défaite allemande et ne veut plus se mouiller pour rien … Bref, dans son rôle habituel …
Malgré ses qualités incontestables de mise en scène et de trouvailles techniques, ce film avait un sujet en or mais que Clément n'a pas suffisamment exploité. On peut facilement imaginer qu'avec un tel sujet, on aurait pu avoir "le" film inoubliable où le spectateur sort de la salle avec un cœur qui bat à 150 pulsations par minute et complètement révolté par tous ces maudits, tous ces rats qui fuient l'aventure nazie ou qui risquent d'échapper à la punition. C'est vraiment très dommage.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Films de guerre - Vingtième siècle, Films noirs et Les meilleurs films de 1947
Créée
le 19 oct. 2022
Critique lue 52 fois
4 j'aime
2 commentaires
D'autres avis sur Les Maudits
René Clément n'est pas n'importe qui au sein du cinéma français, c'est le moins que l'on puisse dire, notamment après le visionnage des Maudits. Ce semi-huis-clos à l'intérieur d'un U-Boot, troisième...
Par
le 14 juil. 2013
12 j'aime
Il s'agit d'un film de guerre se déroulant pour une bonne partie dans un sous marin U boat allemand. Le film se déroule en 1945 durant les derniers jours de la seconde guerre mondiale. Les premières...
Par
le 3 juin 2015
8 j'aime
1
En visionnant en 2014 cette mutinerie reléguée aux abysses comme poussière sous un tapis, on mesure l'effet des engouements collectifs. Ainsi, de La Nouvelle Vague, imposée comme référence, et qui...
Par
le 16 juil. 2014
5 j'aime
Du même critique
Au départ de cette aventure, il y a un roman écrit par la romancière R.A. Dick en 1945 "le Fantôme et Mrs Muir". Peu après, Mankiewicz s'empare du sujet pour en faire un film. Le film reste très...
Par
le 23 avr. 2022
25 j'aime
9
1959 c'est l'année de "125 rue Montmartre" de Grangier mais aussi des "400 coups" du sieur Truffaut qui dégoisait tant et plus sur le cinéma à la Grangier dans les "Cahiers". En attendant, quelques...
Par
le 13 nov. 2021
25 j'aime
5
"La Mort aux trousses", c'est le film mythique, aux nombreuses scènes cultissimes. C'est le film qu'on voit à 14 ou 15 ans au cinéma ou à la télé et dont on sort très impressionné : vingt ou quarante...
Par
le 3 nov. 2021
24 j'aime
19