Adapté d'un roman célèbre de H. Rider Haggard, créateur du personnage d'Allan Quatermain, ce film est la plus belle version parmi les nombreuses qui l'ont abordé, c'est le prototype des films d'aventures exotiques africains dont le catalogue est constitué d'une succession de périls, de bêtes sauvages, de pièges, du décor hostile et de tribus indigènes menaçantes qui deviendront des clichés repris par nombre d'autres films du même genre. Tous les films de jungle payent un tribut à cette version, Indiana Jones n'a rien inventé ; déjà, le film héritait tout ça des vieux Tarzan des années 30 et 40, à la différence qu'il s'agissait d'une jungle de studio, alors qu'ici, presque la totalité des séquences sont tournées en Afrique, avec le concours de nombreuses tribus dont est issu l'énigmatique Umbopa interprété par un autochtone non professionnel.
Ce tournage causa bien des soucis à l'équipe technique décimée par les fièvres, la dysenterie, la malaria, les piqûres d'insectes, sans compter la chaleur accablante amplifiée par les projecteurs et les réflecteurs imposés par l'utilisation d'une pellicule couleur.
Le couple Deborah Kerr / Stewart Granger n'échappe pas non plus à la convention hollywoodienne de ce type d'aventures, mais le film n'est pas sans charme, un charme désuet obtenu grâce à de splendides images tournées au Kenya, au Tanganyika et dans l'ancien Congo belge. Ainsi, il n'est pas seulement un banal film d'aventure tourné pour l'exotisme de son décor, mais une véritable carte postale de l'Afrique telle qu'on se la représentait en 1950, à une époque de "oui bwana" où les Occidentaux parcouraient la savane en compagnie de porteurs indigènes. Les scènes de danse tribale se déroulant chez les Watusi (qui deviendra un cliché dans tout film "africain"), ainsi que les nombreux plans d'animaux (dont ceux de l'incendie de brousse avec la fuite des bêtes affolées) donnent un réalisme assez rare pour l'époque dans ce type de films. Voici donc un grand classique non seulement de qualité possédant un vernis, une patine (grâce aussi à son Technicolor rutilant), mais également une oeuvre exaltant la grande aventure avec une touche de profondeur.