"Les Nageuses" (2022) est un film à la fois captivant et décevant. Dès les premières scènes, le spectateur est entraîné dans l'histoire de Yusra et Sara Mardini, deux sœurs d'origine syrienne, qui partagent la passion de la natation (transmise par leur père qui est aussi leur coach) et l'espoir d'un jour devenir athlètes olympiques. Se présentant d'emblée comme un biopic, on s'attend à un grand format retraçant la vie des sportives depuis leur début et jusqu'à leur accomplissement, soit les JO de Rio.
Mais ce n'est pas le cas.
En effet, le film gravite très essentiellement autour de leur expérience migratoire. Une histoire de traversée qui, faut-il le dire, bien qu'intense, se révèle aussi être celle... de demandeurs d'asile relativement privilégiés. Très loin, donc, de l'expérience plus crue de la majorité des migrants qui, pour leur part, ne peuvent envisager l'éventualité de se régénérer dans des chambres d'hôtels entre les moments les plus rudes, se faire transporter 90% du temps en véhicules et bénéficier d'une chambre privative en alternative au centre fermé (Nizar, leur cousin, ne manquera d'ailleurs pas de leur signifier). L'émotion et l'empathie sont donc assez rapidement contenues, une fois le déchirement de la séparation familiale dépassé.
Cela dit, certains plans du film sont parfaitement conçus, et l'oeuvre ne manque pas de générer de l'intérêt et de l'engagement pour ses protagonistes. Il n'y a rien de grotesque ou de fondamentalement raté dans la réalisation elle-même. Cependant, c'est le choix de l'angle narratif qui met du plomb dans l'aile de ce biopic, lequel aurait pu être bien plus large et sans doute... moins focalisé sur les détails du trajet migratoire, afin d'emporter plus amplement le spectateur. En choisissant de mettre l'accent sur l'expérience migratoire plutôt que tout ce qu'elle sont, le film passe à côté d'une occasion de véritablement marquer les esprits et de rendre justice à l'ampleur du parcours des sœurs Mardini.
Un film agréable et parfois émouvant, mais qui est passé, finalement, à côté de l'opportunité d'être un grand film.