Les Noces funèbres
6.9
Les Noces funèbres

Long-métrage d'animation de Mike Johnson et Tim Burton (2005)

Les Noces funèbres par Gérard Rocher La Fête de l'Art

C'est dans un petit village situé en Europe de l'Est que vit chez ses parents poissonniers le jeune Victor. Le jeune homme rêve d'épouser Victoria, la fille d'une famille de nobles, sévères et hautains. Ceux-ci, complètement ruinés mais cachant à leur entourage cet état, recherchent un "bon parti" pour Victoria. La date du mariage conclue entre les parents des jeunes gens, une répétition des voeux doit avoir lieu en présence du pasteur. Malheureusement, celle-ci se déroule assez mal et Victor s'enfuit dans la nuit. C'est alors qu'il se fait poursuivre par le cadavre d'une jeune mariée qui supplie le jeune homme de l'épouser. Elle va alors entraîner Victor dans le monde de l'au-delà, le "Royaume des Morts". Les cadavres occupant ce lieux sont affables, gais et heureux d'être ensemble. Seule la petite mariée a le vague à l'âme. Elle arrive même à troubler Victor qui finit par l'aimer. Toutefois, malgré le climat d'allégresse de l'endroit, il ne parvient pas à oublier Victoria, restée dans le monde des vivants. Victoria de son côté, en plein désespoir, attend le retour de son petit amoureux.

Est-on plus heureux dans les ténèbres du Royaume des Morts que dans le monde des vivants? On pourrait le croire pour Victor et Victoria qui vivent dans l'univers morose de ce petit village balayé par un fort vent d'hiver. Du côté du garçon, timide et maladroit, les parents sont insignifiants et ridicules. Ceux de la jeune fille sont austères et répressifs à souhait. Seul l 'intérêt financier provoque chez eux un profond plaisir du fait de leur décadence. Le monde des vivants est gris, comme la couleur des images qui le décrive. Les gens de cet endroit se détestent, ils sont envieux, combinards et cruels. Cette société décrite est mesquine, artificielle, remplie de principes et d'idées étroites. Le monde des ténèbres, représenté par des images très colorées est accueillant, chaleureux et solidaire. Tous ces squelettes, ces cadavres, ces asticots ou insectes se retrouvent sur un pied d'égalité et de fraternité dans cette société morbide. Victor va croiser ces morts par l'intermédiaire de cette jeune mariée défunte et va même se surprendre à l'aimer. Toutefois il est sans cesse rattrapé par son amour pour Victoria et c'est de là que vient cette lueur d'espoir nous indiquant que l'amour peut encore exister chez les vivants, même si l'histoire démontre que c'est dans la mort que les gens sont égaux. Victor retrouvera Victoria et par de nombreux hasards de circonstance, les méchants du monde des vivants finiront par entrer dans le monde des ténèbres.

Que dire, si ce n'est qu'il y a tous les ingrédients d'un chef d'oeuvre dans ce deuxième long métrage d'animation de Tim Burton, producteur de "L'étrange Noël de monsieur Jack". Le producteur est également réalisateur avec son talentueux collègue Mike Johnson, et ils utilisent la même technique cinématographique du "stop motion". Et quel enchantement de voir s'animer avec une expression aussi vraie que nature ces marionnettes de silicone et de mousse! Ce film à l'atmosphère gothique transporte le spectateur de la comédie musicale, avec notamment ce ballet de squelettes, aux moments de tendresse et d' émotion en passant par l'humour le plus noir dont le réalisateur a le secret. Une débauche de trouvailles toutes plus désopilantes les unes que les autres nous captive en apportant à cette oeuvre une certaine singularité. On ne peut rester qu'ébahi devant Victor retrouvant le cadavre devenu squelette de son petit chien, heureux de retrouver son maître, ébahi devant les yeux qui sautent de leur orbite habitée par des asticots bien bavards ou devant les araignées cousant le costume de mariage de Victor. Bien d'autres scènes qu'il faut découvrir sont absolument prodigieuses d'imagination et donnent à ce sujet peu banal une ampleur inestimable. Impossible de passer sous silence les fameux marionnettistes que sont Ian Mackinnon et Peter Saunders réalisateurs de ces fabuleux personnages. Il ne faut surtout pas oublier de mentionner Danny Elfman et sa très belle musique tellement subjective qu'elle rythme ce film de façon magistrale.

Après avoir vu et tellement aimé cette oeuvre, je ne peux que me demander où se terminera l'audace et l'imagination de Tim Burton. Je souhaite qu'elle continue longtemps de me faire rêver à travers la féerie de son monde imaginaire.

Créée

le 6 juin 2013

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