On continue notre cycle Hitchcock, avec un classique du film d’épouvante. Un classique qui date de 1963. Il est assez facile de dire d’un vieux film qu’il vieillit, heureusement, la force de sir Alfred est ailleurs. Comme d’habitude c’est patiemment construit, autour de personnages qui ont des intentions contradictoires ou sont frustrés dans leurs aspirations. Comme souvent il utilise une blonde comme appât. Cette fois-ci, l’appât c’est une Teppe Hedren, un brin superficielle, fille à papa, un brin mystérieuse aussi, avec un manteau de fourrure sur le dos, au volant d’une grosse cylindrée. Elle a le béguin pour un gars rencontré la veille dans un magasin. Elle poursuit cet homme. Une histoire d’amour s’annonce, entre la belle et l’homme tranquille, avocat rangé. Mais la mère du gars fait la gueule. Cette fille très « libérée », ne lui inspire pas confiance. L’institutrice, ancienne maîtresse de l’avocat, s’en mêle elle aussi, mais garde ses distances. On est dans une bourgade éloignée, au bord de la mer. Un film sans histoire. Et soudain les oiseaux attaquent !
Pourquoi ? On ne sait pas pourquoi, car il n’y a aucune explication, ce qui a dû frustrer tous les spectateurs dans leurs sièges. C’est le début des films à effets, seul l’effet compte, et je trouve qu’ils n’ont pas si mal vieillis que ça les effets spéciaux. Ils ne sont pas au centre du film, ils sont la pour impressionner, et détourner l’attention, puis le film revient tout le temps à l’essentiel, les liens entre personnages, qui au lieu de fuir, se demandent pourquoi les oiseaux attaquent. Comme dans un cauchemar, ils sont là à tergiverser. Pourquoi ?
C’est le film d’épouvante nouveau genre par tonton Alfred. Le nouveau film d’épouvante hollywoodien. Encore une fois le travail sonore est plus impressionnant que les images, et le bruit de millier d’ailes qui battent dans l’air, fait penser à des hélicoptères de combats qui frappent, à toute vitesse, au hasard. Aucune musique inutile, ça fonctionne toujours, car ça parle à notre cerveau reptilien, bon point. Le travail en champ-contrechamp à répétition est magnifique de maîtrise et de suggestion. On croit comprendre ce que ressent l’héroïne à l’écran. On croit voir ce que ressent Mélanie (Teppe), spectatrice de la situation comme nous, sans comprendre, victime. Hitch est un as de ce qu’on appelle la caméra suggestive, mettre le spectateur à la place des acteurs dans n’importe qu’elle situation. Ça se confirme encore une fois ici. Mais pourquoi ils attaquent ces satanés volatiles ?
C’est complètement irrationnel. L’histoire est irréaliste, les effets spéciaux grotesques, réalisés à grands coups de hache, et Teppe Hedren sera sacrifié car trop blonde, et trop curieuse. De nos jours, ce genre de film serait classé série B ou Z. Réalisé par tout autre qu’Hitchcock, on ne retiendrait que l’originalité du sujet, et les scènes de panique. Comme c’est le maître du suspense, tout le monde attend un autre drame psychologique d’après guerre. Or je pense que c’est aussi un drame psychologique. Traité différemment, de façon complètement originale. Les meilleurs films d’épouvante sont souvent développés dans un contexte dramatique, et pas seulement gore. Alors qu’est-ce qu’on ne voit pas, et qu’on aurait dû regarder ?
Un cauchemar sûrement. Les oiseaux sont la matérialisation d’un rêve qui tourne au cauchemar. L’histoire d’amour avortée, tuée dans l’œuf par une catastrophe imprévisible : Les oiseaux ! Ça aurait pu être la fin du monde ou un tremblement de terre ; et tout le monde reconnaitra qu’un tremblement de terre, est beaucoup plus « prévisible » qu’une nuée d’oiseaux qui tombe sur tout le monde, par vague comme la pluie, ou une nouvelle plaie d’Egypte, sans aucun Dieu pour justifier, sans argument scientifique d’explication. On reste là, seul et sans comprendre. Les oiseaux…..Nonnnnnn !