Le film est sorti en 1983 et c’est un jeune Gérard Darmon qui occupe le rôle principal. C’est une sorte de chronique réaliste qui nous présente Nara, un gitan vaguement sédentarisé qui vit dans un HLM pourri de la banlieue parisienne avec sa mère et sa fille. Entre embrouilles et débrouilles, ce petit monde survit à l’écart de tout. Sauf qu’un jour, ils se font expulser, doivent reprendre la route et la mère se met en tête de rencontrer un grand avocat qui sera à même de défendre l’honneur et la cause des gitans. Ainsi, pour son premier film sur le sujet, Gatlif s’intéresse à une famille sédentarisée. Mais en creux c’est le portrait d’une famille que tout mène à la route, voire à l’errance. Dans ce minuscule appartement, la vieille mère ne supporte pas les fenêtres fermées. Elle est entre ces murs comme dans une prison. De son côté, la gamine choisit de s’enfermer ou de s’ouvrir dans l’école de la République contre l’avis de Nara son papa, persuadé que ce n’est pas la place d’un gitan. Gatlif livre ici un portrait sans fard, âpre, dur. Le film rebute dans ses premières minutes mais il fascine par la suite. Tels des survivants de l’apocalypse, la petite famille déambule dans des décors de western maudit. On assiste, ça et là à des scènes d’humiliation quand on les dirige vers un terrain réservé aux gens du voyage qui est en fait une décharge publique ou quand il sont délogés en pleine nuit par une police qui rappelle d’autres temps … Gatlif semble dire que les gitans n’ont pas leur place parmi les sédentaires et même que la route est leur destinée et leur alliée car elle les protège du rejet de la société installée. Car en toile de fond, les discriminations et surtout les incompréhensions entre deux mondes aux valeurs opposées sont omniprésentes. C’est raide mais ça fait du bien.