Dans la filmographie culte de Marilyn Monroe, Ladies of the Chorus fait parti de ces films peu connus. Il faut dire qu'il n'y a pas un John Huston ou un Joseph L. Mankiewicz derrière et que Marilyn ne joue pas une blonde pulpeuse et plein de charmes dont la présence dans une ou deux scènes des films des deux réalisateurs précédemment nommés suffit à la charismatique actrice à être la tête d'affiche des films (moins vrai pour Ève...).
Non, ici dans le premier rôle principal de son éphémère carrière, elle joue une héroïne assez classique du petit cinéma romantique hollywoodien. Elle y est mignonne, plein de sympathie et un peu crédule mais plein de cœur et de gentillesse.
Mais pourquoi faut-il voir Ladies of the Chorus ? parce que oui, il faut absolument le voir. Eh bien parce que c'est un film qui préfigure la carrière de Marilyn mais qui dit aussi beaucoup de choses sur son futur, loin d'être tout rose.
Même si l'on est loin de Lorelei ou de Sugar, le personnage de Marilyn incarne des facettes communes à de nombreux rôles de la carrière de l'actrice. Cette jeune fille ingénue, mais bien loin d'être idiote (contrairement à certains rôles futurs), cette superbe chanteuse et bien sûr, cette immense beauté. Le film conjugue toutes ces facettes de l'actrice, assez fascinant que rien n'a réellement changé pendant 15 ans et qu'on la presque toujours cantonné à ce genre de rôle.
Marilyn certes, mais résumer le film à cela serait mal faire. Déjà saluons la superbe performance de Adele Jergens dans son rôle de mère qui forme avec Monroe un duo superbe et attachant. Mais ce qui nous marque surtout dans ce film c'est son histoire et surtout son discours. Car si cette histoire d'amour pour lequel le couple Monroe-Brooks lutte est assez classique, la manière dont ils arrivent à leurs fins et surtout la galerie de personnage autour d'eux est très intéressante.
Phil Karlson dresse un monde ordonné, où chacun a sa place et ne peut s'y dérober, et un monde de faux-semblants, car chaque petite frontière franchie par l'un des personnages est bien accueilli pour essayer de saboter dans l'ombre ce changement.
Sous ses airs de film musical, avec ses numéros joyeux, Ladies of the Chorus est un film profondément acerbe et désespéré. Un récit où la classe populaire se fait piétiner par de plus hautes gens.
Cela est d'autant plus marquant et bouleversant avec sa fin :
Alors que l'on pense se diriger vers un happy-end hollywoodien où les partis font abstractions de leurs idées obsolètes, ce n'est que grâce à un mensonge que la situation se dénoue. Le conflit n'est pas résolu, la seule solution pour s'adapter à ce monde est d'user de stratagèmes pour passer inaperçu. Sourire au regard des uns, mentir au regard des autres.
Bien plus profond et triste que l'on peut penser, Ladies of the Chorus est assurément l'un de mes films préférés de la filmographie de Marilyn préfigurant, l'image qu'elle devra donner au monde pour continuer de vivre. Un film d'autant plus touchant qu'il apparaît au début de la carrière de l'actrice, à un moment où rien dans son esprit et ses idées n'est encore brisé. Elle y est encore en grande partie Norma Jeane, avant de céder la place à Marilyn.