La superbe édition concoctée par les petits génies du Chat qui fume fait vraiment honneur à un giallo bien plus original que prévu.
La mise en scène, par exemple, une fois restaurée, révèle toutes ses subtilités. Un montage nerveux usant parfaitement des codes du genre (l'utilisation du zoom est à son apogée) pour immortaliser les meurtres cède la place à des plans beaucoup plus composés qui mettent à profil l'architecture angoissante de l'immeuble qui concentre la plupart de l'action. Et que dire de la lumière, sinon qu'elle atteint la force d'évocation de certains des tableaux de Bava, particulièrement quand une allumette surpuissante peine malgré tout à traverser les ténèbres, ou même quand une jeune femme menacée se perd dans un angoissant plan large traversé de part et d'autre par d'incisifs lens flares.
Des jeunes femmes qui se retrouvent au cœur de l'intrigue et pour cause: elles sont objectifiées par la quasi intégralité des personnages, que ce soit à travers le racisme, le marché du sexe ou la publicité. La magnifique Edwige Fenech (que George Hilton qualifie de "plus grande actrice sexy de l'époque" dans le bonus Les fleurs de sang) et ses comparses ne sont ici victimes que d'une chose: nos regards de petit vicelards, ce que le traditionnel ballet final de twist soulignera d'ailleurs bien. Pour son unique giallo, Giuliano Carnimeo se joue ainsi de son imagerie fétichiste sans jamais trahir l'essence du genre.
Parfois franchement magnifique (et parfois un peu brouillon, j'dois l'avouer), Perche' Quelle Strane Gocce di Sangue sul corpo di Jennifer ? (tout est dans le titre, une fois de plus) se fait un plaisir d'encourager notre amour d'un bis rital toujours plus séduisant par sa liberté.
De Palma ne s'y est d'ailleurs pas trompé, lui qui repris la séquence d'ouverture pour son hommage à Hitchcock. Ce dernier mettant également en scène le corps féminin avec un fétichisme obsessionnel, on serait presque tenté de faire des parallèles douteux.