Rock et Cinéma sont deux univers, "deux mots qui vont très bien ensemble" (thanks, The Beatles !). Depuis "Le rock du bagne" (1957), avec le King, on ne compte plus les mariages réussis. Mais Elvis Presley englué dans de sirupeuses histoires pour midinettes en mal (mâle) d'idolâtrie, c'est du passé et dépassé dans les années 80.
Crise de société oblige, l'union Rock-Cinéma a alors donné naissance, aux forceps scénaristiques, au divorce avec tout ce qui fait fleur bleue. Portant d'autant mieux ses fruits, commercialement parlant, qu'elle a engendré souvent des oeuvres noires. Avec donc, comme dans "Les rues de feu", signé par un vieux briscard hollywoodien, de jeunes héros mus surtout par une dangereuse désespérance.
Rock et Cinéma : Walter Hill joue astucieusement de la dimension mythique qui se rattache à ces deux univers. Son film, plaisir pour l'oeil et l'oreille d'abord, colle tout à fait à son époque ; mais, dans le même temps, il véhicule voluptueusement toute la nostalgie des années 50 et 60. Cette fameuse décennie 1955-1965, omniprésente dans les souvenirs des uns et la rétro-projection fantasmée des autres, elle est à la fois revisitée et comme projetée dans l'avenir.
C'est pour ainsi dire l'intrigue amoureuse de "West side story" dans l'univers urbain aussi futuriste et déshumanisé de "Blade runner" !
Et à l'évidence, pour le réalisateur de "Sans retour" et des "Guerriers de la nuit", une nouvelle manière de chorégraphier son thème-obsession : la violence. La séquence d'introduction, faisant bien les présentations avec la belle et rebelle chanteuse (Diane Lane) en route vers la gloire, le héros (Michaël Paré) en révolte contre lui et les autres, et le méchant de service (Willem Dafoé) qui terrorise la ville avec sa bande de voyous façon Hell'sangels, est signée. Avec ces derniers, véritable "Horde sauvage" urbaine chevauchant de rutilantes motos, Hill a réglé des séquences choc que Peckimpah lui-même pourrait revendiquer. Violence stylisée mais aussi poésie désespérée dans ce film baignant dans une ambiance nocturne et mouillée.
Mais la grande, la forte séduction de ce film clin d'oeil, tant on pourrait multiplier les rapprochements, a trait à la B.O. signée Ry Cooder. C'est bien simple : pour trouver une bande son aussi électrique, électrisante, il fallait alors remonter à celle de "Phantom of The Paradise", de Brian de Palma.
Côté interprétation, Michaël ne pouvait que sembler Paré pour une carrière de premier plan... Perdu !
Et il y a surtout de quoi faire ami-ami, et pas qu'à moitié, avec Amy Madigan. Avec un rôle casse-gueule tout en masculinité - Mac Coy "le soldat" - elle impose si bien le charme enfantin de son visage et sa présence d'actrice que, en sillonnant ces "rues de feu", on s'enflamme en définitive plus pour elle que pour Diane Lane !