"L'esprit fantassin n'existe plus, c'est un tort."
Je n'ai pas vérifié si un autre SensCritiquien avait utilisé le même titre que moi pour sa critique, mais avec la cargaison de répliques cultes dont est doté ce film, je me dis que j'ai une chance d'échapper au plagiat.
Les Tontons flingueurs, ce n'est pas un film aisé à critiquer. À chaque fois, lorsque c'est culte à ce point, on touche au sacré, à ce qui confine au silence. Néanmoins, mon devoir m'oblige à m'employer.
Commençons par les défauts, pour évacuer vite cela, et expliquer simplement pourquoi je ne lui mets pas plus :
- le film manque un peu de rythme sur sa 2e moitié
- Patricia est pénible
- Claude Rich, quoique souvent culte, est un peu fatigant parfois
Voilà. Comme ça c'est fait, et on peut passer aux choses plus sérieuses.
Les Tontons Flingueurs c'est l'emblème mérité d'un cinéma populaire français des années 60, qui avait un autre coffre qu'aujourd'hui ! Oh, certes, on pourra encore trouver aujourd'hui quelques très grands moments, quelques très bons acteurs. Mais globalement, les acteurs des Tontons Flingueurs occupent l'espace, tout en mesure et en densité. Lino Ventura a une présence. Bernard Blier et Francis Blanche aussi. Jean Lefebvre est aussi au sommet de sa forme, dans un style différent. Ils VIVENT le film. Cela lui donne une épaisseur indéniable.
Les Tontons Flingueurs, c'est habité d'un humour qui a à peu près disparu. Fait de finesse et de gouaille, d'une tendresse sincère enrobée dans un argot coloré. On est loin des grosses scènes de rire bien gras qu'on nous sert aujourd'hui matin, midi, et soir. Encore une fois, je ne mets pas tous les humoristes contemporains ni toutes les comédies actuelles dans le même panier, mais je sens un air intrinsèquement plus vulgaire dans le rire d'aujourd'hui, d'une manière générale. À chacun son époque humoristique.
Celle des Tontons Flingueurs est faite de dialogues "glacés mais sophistiqués" (si certains relèvent ma référence), de têtes subtiles, d'humour tacite et distingué, coloré par une langue populaire et haute à la fois.
Alors, non, je n'ai pas connu l'époque, en dépit du fait que ma critique fasse un peu "vieux con nostalgique". Tant pis, j'arrive à en apprécier ici l'un des chefs-d'oeuvre. C'est ma satisfaction personnelle, d'arriver peut-être à entrevoir une sympathie spirituelle avec l'essence de celui-ci. Une proximité qui paraît feinte ou naïve aux indigents intellectuels, mais qui n'en est pas moins réelle.
Mais, après tout, la bave du crapaud n'empêche pas la caravane de passer.