Ce film de Henry Hathaway date de 1935. Il évoque un morceau de vie du 41ème régiment de lanciers britanniques. L'action se déroule à l'extrême nord des Indes britanniques où la population semble plutôt musulmane. Il y est même fait brièvement mention de Khiber qui est le nom du col d'accès à l'actuel Afghanistan.
Deux jeunes sous-lieutenants (Franchot Tone et Richard Cromwell) à peine sortis de l'école rejoignent le régiment et sont accueillis par un lieutenant expérimenté, bougon mais le cœur sur la main (Gary Cooper) ; il se trouve aussi qu'un des sous-lieutenants est le fils du très autoritaire et inflexible colonel du régiment. Avec ça, on a tous les éléments pour que les jeunes sous-lieutenants aient l'occasion de mesurer les difficultés de la vie militaire en campagne, connaitre leur baptême du feu face à un ennemi sournois et hostile jusqu'à quelques actes d'héroïsme. Bien entendu, de l'adversité nait entre les trois officiers sinon une amitié, au moins un esprit solidaire.
Mais ce qui est surtout amusant quand on prend un peu de recul, c'est qu'il aurait suffi de changer "les autochtones" qui sont ici des indiens musulmans en amérindiens et on obtient un superbe western dans lequel s'affronteraient un régiment de cavalerie et des indiens (d'Amérique) …
D'autant que le film est tourné dans la Sierra Nevada en Californie. La mise en scène de Hathaway est très remarquable en décors naturels avec une reconstitution minutieuse de l'ambiance de ce Bengale où la rébellion couve en permanence et où la population grouille.
Le casting est très bon
Gary Cooper dans le rôle du lieutenant qui a tendance à ruer dans les brancards avec sa hiérarchie qu'il trouve par trop attentiste est excellent. Derrière le militaire, il y a l'homme qui ne comprend pas la rigidité du colonel face à son fils et tente de forcer les relations entre eux deux.
C'est Franchot Tone qui tire le mieux son épingle du jeu. Dans un rôle à la fois facétieux et plein de second degré. Curieux cet acteur qui ne laisse jamais indifférent. C'est un acteur que je connaissais sans connaître son nom ! et que j'avais toujours apprécié dans "les révoltés du Bounty" (1935), "Trois camarades" (1938) puis dans "Phantom Lady" (1944).
Richard Cromwell joue le rôle du jeune sous-lieutenant, fils du colonel. La dernière scène où il laisse échapper quelques larmes dont, seul, il connait le vrai prix est magnifique.
"Les trois lanciers du bengale" est un film qu'on peut quand même considérer comme colonialiste dans la mesure où la présence britannique au Bengale n'est pas un sujet ici et où l'armée britannique affiche une morgue certaine face à la population. Mais si on s'affranchit de ces "petits" détails, on a affaire à un très bon film d'aventures bien conduit et bien joué qu'on suit avec grand plaisir.