D'Artagnan,jeune gascon surexcité à l'intellect déficient,quitte sa province pour Paris,où il espère intégrer le corps des Mousquetaires du Roi.Après s'être lié d'amitié avec Athos,Porthos et Aramis,trois mousquetaires expérimentés,il se retrouve par hasard mêlé à une sombre affaire impliquant la reine Anne d'Autriche,le Duc de Buckingham,premier ministre anglais,et le cardinal de Richelieu qui dirige la France plus que ne le fait le roi Louis XIII.Il est des films comme ça qu'il vaudrait mieux ne pas revoir,à l'exemple de cette énième mouture du roman d'Alexandre Dumas concoctée par des anglais.C'était super sympa dans son jus des seventies mais ça fait triste mine vu d'aujourd'hui.Il est vrai qu'en faisant appel à Richard Lester,réalisateur notoirement iconoclaste,les producteurs Alexander Salkind et son fils Ilya,s'exposaient à engendrer une guignolade de fort tonnage,ce qui ne les empêchera pas de remettre ça avec le british en 80 et 83 pour lui confier les rênes des épisodes 2 et 3 de "Superman",des films d'ailleurs très critiqués en leur temps compte-tenu de leur inclination ironique.Lester,auteur au préalable de comédies toniques telles que "Quatre garçons dans le vent" avec les Beatles ou "Le Knack",est cependant un excellent cinéaste et son illustration de ce méga classique du cape et d'épée ne manque pas d'allure.C'est très bien filmé,l'enchaînement des scènes est dynamique,les placements de caméras inspirés,et la direction artistique luxueuse avec plein de chevaux,de costumes chamarrés,d'armes,de carrosses et de décors originaux,avec en sus une bonne musique entraînante de Michel Legrand.Ce qui pêche en revanche est le ton ouvertement comique adopté par Lester et son scénariste George MacDonald Fraser,lequel nous sert justement plus du MacDo que de la haute gastronomie.Vouloir rompre avec le style sérieux des versions précédentes n'était pas une mauvaise idée mais les mecs se sont salement plantés dans le dosage.En l'état on est quelque part entre les pitreries des "Quatre Charlots mousquetaires",qui sortira l'année suivante,et les combats de kung-fu du "D'Artagnan" de Peter Hyams de 2001.Tout va de travers entre personnages outrageusement ridicules et joutes d'escrime molles et horriblement mal chorégraphiées lors desquelles,c'est un comble,les prouesses de bretteurs sont délaissées au profit de l'utilisation d'éléments de décor,des draps qui sèchent,de la nourriture qu'on vole tout en se bastonnant et toutes sortes d'objets détournés de leur fonction première.Plus grave encore l'accent est mis sur le fait,perfidie anglaise oblige,que les mousquetaires sont en réalité,en plus d'être des voleurs et des hommes volages,des traîtres à leur pays.En effet ils se targuent d'être au service du roi alors qu'en fait ils sont plutôt à celui de la reine,laquelle fricote avec Buckingham,un type qui veut se taper Anne et accessoirement envahir la France.Et c'est ce mec que les quatre connards vont s'ingénier à protéger,soutenir et sauver,les vrais héros étant les supposés méchants de l'histoire,à savoir Richelieu et ses soi-disant vilains gardes.Les protagonistes dansent volontiers à côté de leurs chaussettes,à commencer par la reine qui semble être une idiote doublée d'une belle salope.La voilà qui rencontre le rosbif en secret mais se refuse à lui bien qu'elle meure d'envie de fauter.Le Duc lui réclame alors un objet personnel pour garder un souvenir d'elle.Tu parles,il veut se pignoler avec!Et que fait la souveraine?Elle lui remet les fameux ferrets,des bijoux ornant son collier.Déjà elle se pointe à un rencart clandestin dans une sorte de blanchisserie pourrie en trimballant à son cou des caillasses qui coûtent 40000 ans de SMIC de l'époque,et elle ne trouve rien de mieux que de les refiler à un potentiel amant qu'elle refuse d'éponger!Pourquoi ne lui donne-t-elle pas sa petite culotte,qui aurait parfaitement fait l'affaire?Et ce brave Richelieu,qui veut nuire à la reine sans qu'on sache vraiment pourquoi,parce qu'elle ne l'aime pas et veut diminuer son influence apparemment,qui est au courant de la manip,au lieu de balancer direct l'info au roi lui conseille de demander à bobonne d'arborer les ferrets lors d'un bal qui se tiendra plusieurs semaines plus tard.Du coup c'est la course contre la montre pour récupérer les bijoux que Buckingham a emmené en Angleterre grâce à l'aide de ces abrutis de mousquetaires.Tiens,si on en parlait de ceux-là?D'Artagnan est donc une sorte de demeuré impulsif ne pensant qu'à en découdre avec tout le monde.Maladroit au-delà du raisonnable il ne cesse de se viander et de prendre des coups,c'est un peu le Pierre Richard de l'époque,mais il s'en sort toujours à la fin,comme Starsky et Hutch.En outre il tombe éperdument amoureux de Constance Bonacieux,la lingère de la reine,ce qui ne l'empêchera pas de culbuter l'espionne Milady de Winter,puis la servante de Milady,dès qu'il en aura l'occasion.Ses copains,nonobstant que le titre leur est consacré,apparaissent finalement assez peu et se contentent d'exécuter une série de clowneries souvent grotesques.Louis XIII prend cher au passage.On veut bien croire que le mec n'était pas un aigle mais là les auteurs ont fait fort avec cet imbécile sans caractère,fat et indécis,fainéant et influençable,une vraie loque humaine.Constance n'est pas bien maligne non plus mais le pire est son mari,le sieur Bonacieux,ci-devant logeur de D'Artagnan cocufié par son locataire,qui se situe à l'extrême limite de la trisomie.Dans le même genre on a Planchet,le valet du gascon,qui est gros,lâche et un peu attardé mental aussi,mais qui a toujours son utilité dans les bonnes bagarres qui émaillent le film.Il y a un casting rutilant qui opère cependant avec des fortunes très diverses.Michael York,en plus d'avoir une tronche de neuneu,a constamment été un acteur nul et insupportable,il le prouve encore ici brillamment en incarnant le plus regrettable D'Artagnan de l'Histoire du Cinéma.Raquel Welch erre lamentablement dans le rôle de Constance,se demandant visiblement ce qu'elle fout là,mais c'est compensé par ses atouts physiques fantastiques.Geraldine Chaplin en Anne d'Autriche et Frank Finlay en Porthos sont totalement transparents et le pauvre Jean-Pierre Cassel fait ce qu'il peut pour échapper au ridicule absolu en roi de France lobotomisé,sans y parvenir.Roy Kinnear se démène en Planchet mais n'arrive qu'à charger excessivement un side-kick supposément rigolo.Heureusement ça va mieux du côté d'Oliver Reed,qui campe un Athos intense avec une belle autorité,et de Richard Chamberlain qui fait un bel Aramis,fin et racé.Et puis il y a la bande des affreux qui vient relever le niveau.Charlton Heston est magistral en Richelieu froid et manipulateur,réussissant à rendre inquiétant ce personnage systématiquement mis en échec.Christopher Lee est Rochefort,l'âme damnée du cardinal,et il fait étalage d'une classe monstrueuse en homme-lige fidèle et efficace.Magnifique performance également de Faye Dunaway,qui joue Milady avec talent et conviction au point de rendre émouvante cette criminelle sans pitié dont on comprend cependant les raisons qui l'ont guidée.Simon Ward,au look british indéniable,est un parfait Buckingham et Nicole Calfan est délicieuse en soubrette pas farouche.Georges Wilson est très bien dans la peau de Tréville,le commandant des mousquetaires,mais il a fort peu de temps de présence à l'écran,tout comme Joss Ackland en D'Artagnan père ou la superbe Sybil Danning.Une suite,"On l'appelait Milady",a été tournée en même temps et sortira l'année suivante,l'oeuvre de Dumas suscitant les découpages en deux époques,comme en attestent les versions de Bernard Borderie en 61 ou celle toute récente de Martin Bourboulon en 2023.Lester ira même jusqu'à proposer une tardive sequel en 89,intitulée "Le retour des mousquetaires".