"Les Vestiges du Jour" est tout simplement le plus beau travail de James Ivory à ce jour, et sacre le triomphe de la méthode "Ivory-Merchant", si souvent taxée d'académisme : à la fois émouvant et intelligent, plein de sentiments sans jamais tomber dans le sentimentalisme, le film est surtout d'une précision extrême dans sa description (apparemment) tranquille d'un monde qui fait passer les devoirs professionnels et les rituels sociaux devant les émotions et les sentiments, et des désastres qui s'ensuivent. Le contexte politique et moral radicalement tragique (les errements pro-nazis d'une certaine aristocratie anglaise) ne fait qu'ajouter une perspective encore plus menaçante et cruelle à une histoire dont les protagonistes gâchent irrémédiablement leur vie dans le respect des conventions. En réussissant à décrire avec une subtilité impressionnante le piège mortifère des conventions, portées à l'extrême par un excellent Anthony Hopkins, "les Vestiges du Jour" élève un mausolée tragique à toutes ces vies perdues. [Critique écrite en 1994 et 2003]