Passez votre chemin, braves gens, ce film n’est pas pour vous.


Adaptation théâtrale d’un succès de la scène de l’entre-deux guerres qui flirtait encore avec les douceurs belle-époque, le film ne contient en aucune mesure la moindre petite parcelle d’humour moderne savamment décalé, d’esprit sarcastique du meilleur ton ou encore de critique sociale amère et désabusée.


Nous traînons ici dans le joli monde des femmes entretenues et des rentiers parvenus, les petites vacances à Cabourg, les petites tromperies entre amis, le flegme à la française en toute occasion, la charme séculaire du cocu magnifique…


On se surprend même à découvrir ici des automobiles tant la calèche semblait indispensable, à noter la présence en particulier d’un pot de yaourt en lice pour le titre de voiture la plus laide au monde avant l’arrivée de la twingo, je ne sais pas comment ça s’appelle, c’est minuscule, ça possède la portière sur le devant, le volant accroché dessus, il n’y a pas de capot et il semblerait bien que ça roule…


Dans cette ambiance oubliée depuis longtemps dans un monde qui ne connais plus ni Marcel Prevost, ni Gyp, ni même Paul Bourget, l’histoire étire sa douceur feutrée de salon parisien en villa ensoleillée avec l’élégance de ses situations scabreuses et de ses mots d’esprit soigneusement prononcés par des interprètes de haut vol.


A ce petit jeu, notre bon héros Fernandel ne fait pas le poids mais de son mieux ce qui n’est déjà pas si mal. Face à lui, une Béatrice Bretty impériale en marâtre, une Simone Valère délicieuse en concubine maritale et surtout un Pierre Dux absolument génial avec la moustache de Melvyn Douglas.


Pierre Dux je vous ai déjà dit tout le bien que j’en pensais ailleurs, j’ai rappelé son passé comme professeur émérite des Bébèl, Rochefort et autres Claude Rich, j’ai regretté tout haut de ne pas lui connaître une carrière plus prestigieuse et je suis encore renforcé dans mes doux regrets. Représentant d’un métier qui n’existe plus, maître indépassable d’un art oublié, Dux m’a tiré des larmes d’une joie pourtant sans mélange à chacune de ses répliques malgré quelques effets faciles dans un texte parfois trop gourmand qui a les défauts de ses qualités.


Mon seul regret tient à un titre accrocheur qui frise l’escroquerie tant le sujet de l’alcoolisme est ici secondaire et avant tout présent pour son contraire, ce qui est tout de suite moins réjouissant, mais comme vous ne pouviez savoir ce détail, on se demande comment vous avez pu passer à côté d’une aussi jolie chose…


… Ah oui, j’oubliais, ce film n’est pas pour vous.

Torpenn
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le 12 mars 2014

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Torpenn

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