Après le sublime "Phantom Thread" dans lequel il filmait avec brio et une élégance appliquée magnifiant des acteurs au sommet de leur talent un Pygmalion styliste de mode et sa muse, Paul Thomas Anderson nous offre une nouvelle variation sur le thème de la rencontre amoureuse. A-t-il réussi à renouveler le genre ? Le film restera-t-il dans les annales du cinéma ? Je dois admettre que j'en doute très fortement.
Alors oui je reconnais que le duo formé par Alana Haïm et Cooper Hoffman est loin des stéréotypes éculés sur les codes esthétiques que doivent avoir les acteurs américains ainsi les imperfections physiques des acteurs sont visibles et ne sont pas atténuées (Ah ! Cette peau acnéique du jeune héros. Ce nez prédominent de la jeune femme objet de ses tourments) ce qui fait du bien à une époque où tout semble lisse, aseptisé. Mais pour autant ai-je été touchée, ne serait-ce réellement intéressée par leur histoire d'amour naissante ? Malheureusement non.
Si on fait abstraction de la bande originale réjouissante, l'atmosphère survoltée et embrumée du début des années 70 parfaitement retranscrite et mise en scène ainsi qu'une galerie de seconds couteaux savoureuse (qui m'a fait regretter de ne pas voir plus souvent Tom Waits au cinéma), qu'est-ce que je retiens de "Licorice Pizza" ? Que l'amour est plus fort que les conventions ? Qu'il faut prendre des risques pour vivre pleinement sa vie ? Rien de tout ça.
Au contraire durant tout le film je n'ai pas réussi à me défaire de mes réticences sur la différence d'âge entre Alana et Gary et lorsque après de multiples scènes de courses effrénées des deux jouvenceaux accourant l'un vers l'autre pour s'avouer leurs sentiments (un immense cliché selon moi mais passons), leurs chemins se croisent je n'ai pas ressenti une bouffée de tendresse parcourant mon coeur pour eux. L'issue heureuse de leur histoire ne m'a rien fait ressentir ce qui est problématique quand on cherche à dépeindre une histoire universelle. Sans doute me serais-je sentie plus impliquée par leur relation si elle s'étalait sur plusieurs années pouvant ainsi constater son évolution effective et sa maturation. Mais non les obstacles se présentant aux héros sont aisément franchissables (Alana devant se résoudre à retrouver Gary suite à des désillusions avec la gente masculine)
Je n'aborderai pas en détail les failles scénaristiques présentes ici et là. Ainsi les projets entrepreneuriaux de Gary m'ont vraiment plus ennuyé qu'intéressé. Je n'ai pas pu m'empêcher de me demander comment le marché des matelas aquatiques avait pu exister à une époque pas si lointaine ; la pléiade de personnages secondaires à peine esquissés m'a laissé un goût d'inachevé. Enfin des thèmes sociétaux superficiellement évoqués comme le tabou autour de l'homosexualité sont malheureusement pas assez développés.
PTA est nostalgique d'une ère révolue mais rien n'y fait, son propos glisse sur moi. C'est bien connu la nostalgie n'est plus ce qu'elle était.