Un gros coup de mou, Steven ? Voilà près de dix ans que le cinéaste hollywoodien modèle enchaîne les films en demi-teinte, sur le plan artistique ou idéologique. Lincoln, c'est un petit peu des deux : la réalisation, à ce titre, est solide d'un point de vue technique mais un poil fade en termes d'originalité, la reconstitution passant majoritairement par un décor de rue et des costumes, l'ensemble du film se passant dans des greniers ou devant des green-key. Mais, dans le fond, ce n'est peut-être pas grave pour un film qui ne fait littéralement que parler pendant 2h30... Le casting ? Riche, au minimum, avec des confirmations (Lee Pace, Walton Goggins), des "toujours aussi bon" (Tommy Lee Jones, David Strathairn), des retours inattendus (Sally Field toujours en vie, James Spader véritablement ressucité) et bien sûr Daniel Day-Lewis, impeccable comme à son accoutumée mais qui doit également beaucoup à son maquillage et ne délivre pas le meilleur de lui-même pour une fois.
Ce qui me dérange le plus, c'est la volonté farouche de Spielberg de démontrer que le 13ème amendement ne doit finalement son vote qu'à une série de magouilles politiques, de pressions présidentielle, de dessous de table presque et de lâcheté de certains membres politiques de l'époque. Sauf erreur de ma part, appuyer aussi fortement qu'un amendement aussi essentiel dans l'histoire de l'humanité soit le fait de pratiques douteuses, même au vu du contexte de l'époque, est peut-être à l'opposé de l'idée du film, c'est-à-dire la glorification de l'acte courageux de Lincoln. Ceci dit, on pourra apprécier ce petit clin d'oeil (du mois c'est comme ça que je le perçois) à Obama en ce sens que Lincoln, au final, n'a su obtenir sa victoire qu'avec l'aide d'une équipe de communication incroyablement efficace.
Mais peut-être est-ce moi qui suis parano. Peut-être vois-je le mal partout. Mais la vue de la condition noire selon Spielberg n'est pas moins problématique que celle, bien plus décriée, de Tarantino dans Django Unchained. Si ce n'est que dans l'un, on passe un vrai moment de cinéma ; dans l'autre, on ne fait que dormir paisiblement, au mieux.