Je m'appelle Linda, et je suis une petite fille que l'on a envie de baffer et d'embrasser tour à tour.
Je vis seule avec ma maman, dans un quartier cool, multiculturel mais un peu abandonné aussi. Ma maman, je l'aime trop, même si elle est injuste avec moi et qu'elle ne sait pas réparer les maisons.
Mon plaisir, c'est de jouer avec sa bague pour grandir et tenter de me souvenir. Mais maman, elle se fâche toujours en me disant de la lui rendre. C'est son souvenir de papa, qui est dans le noir. Je me demande s'il a existé papa, car moi, je n'ai pas d'image de lui. Mais non patate ! J'étais trop petite quand il est quand il est tombé avant de manger !
Maman m'a grondé alors que j'avais rien fait, c'était la faute au chat. Pour se faire pardonner, elle m'a demandé ce que je voulais. Et moi, je lui ai demandé du poulet. Parce que c'était la recette de mon papa, je crois.
Sauf que mon monde s'est arrêté : c'est la grève générale : Y'a pas de doute, j'habite bien en France. Et pas moyen pour maman de trouver de poulet pour se rattraper. Rien d'ouvert, pas même la boucherie halal du quartier.
La recherche de l'oiseau rare nous a poussées dans une grande aventure à hauteur d'enfant, folle et drolatique, et j'ai pu comprendre que les adultes, hé bien finalement, ils sont quand même restés comme moi, après tout. Maman et Tata Astrid en tête. Elle est peut être prof de zen, Tata, mais elle n'arrête jamais de crier après maman, comme quand elles étaient petites.
Cette aventure m'a donné plein de couleurs vives dans les yeux, comme si l'énergie de ma farandole contaminait maman, mes amies et tout le quartier. Même les policiers en bleu, ils n'ont pas pu nous attraper quand on essayait d'attraper ce maudit poulet pour lui tordre le coup. Sauf que maman, elle sait pas tuer les poulets, et courir après, ça nous a pris drôlement longtemps. Mais c'était bien quand même, parce que c'était pas qu'une histoire de poulet. C'était aussi une histoire de mémoire de souvenirs après lesquels on court dans un tourbillon d'émotions.
Sûr que notre épopée, à maman, à moi, à Tata Astrid et à tous les autres, est incongrue et absurde, mais elle contamine tout le quartier d'étrangeté et de belles couleurs. Et même si c'est la grève et que tout le monde n'est pas content, tout se termine dans une bonne humeur contagieuse, comme dans tous les albums d'Astérix que j'ai lus.
Pas de doute, je vis bien en France, mais dans une France d'entraide et d'utopie, pavées d'images d'Epinal et d'actualité quand on la regarde à la télé. Et si mon film, il est parfois un peu moins naïf et innocent qu'il le devrait, il apporte aussi un petit arc-en ciel dans tous les coeurs.
C'est quand qu'on mange, Maman ???
Behind_the_Mask, sacrifice de poulet.