Puéril n'est-ce pas? Et pourtant ces mots jetés en l'air peuvent avoir de terribles répercussions, surtout dans les terres d'Orient.
Pour bien comprendre L'insulte il ne faut pas appréhender ce film avec notre vision européenne, notre déterminisme culturel. C'est une tragédie arabe qui n'appartient qu'à ses représentants et on se doit de rester neutre. Neutre mais pas insensible. D'autres pays, d'autres cultures, d'autres mœurs.
On entend souvent que les arabes ont le sens chaud. Il n'y a rien de plus vrai. Aucun mépris où jugement de valeur à y voir, encore une fois nous sommes en terre étrangère et la notion de fierté est une chose d'une extrême importance dans les pays sémites. Un homme en arrose un autre par inadvertance. Une insulte fuse. Puis un acte revanchard se greffe. On a déjà oublié qui a commencé mais la haine s'insinue, les mots deviennent cruels, le coup part et on se retrouve déjà au tribunal. Car on a refusé de s'excuser. Le pays s'embrase, tels des faux amis qui prennent votre parti sans connaître toute le début de l'histoire. Les médias dignes de BFM, les politiques et autres avocats à sensation patriotique vous érigent en cause nationale. Vous n'existez plus, vous devenez un rouage écrasé dans un système qui se complet à s'autodétruire. Et pourvu que ça dure.
Le magnifique soleil du Liban se reflète avec grâce sur les visages tourmentés de ces gens perdus. La caméra vie, virevolte et nous dévoile ces vies brisés. La focale est utilisé de manière intelligente et nous permets de suivre une mise en scène bien rodée. Toutes les séquences se tenant dans l'enclos du tribunal sont vecteurs de tensions, de questionnements.
L'inévitable question palestinienne. Qui sommes nous pour en juger? Qui peut en juger? Le réalisateur ne se fait pas bourreau, il s'assoit à côté de nous, en observateur. Chacun a souffert mais personne n'a le monopole de la souffrance. Les femmes et les vieux sont les rares à en avoir conscience, guerre oblige. La jeunesse est-elle déjà condamné à se haïr?
Il est aberrant qu'un film si brillamment mené tourne à la farce politico-guerrière dans son dernier tiers. L'enceinte du tribunal se suffisait à elle-même et les propos échange permettaient une vraie réflexion. La justesse et la sobriété qui se dégageaient de Adel Karam (Tony) et Kamel El Basha (Yasser) sont écornés par le battage des rues.
Néanmoins pendant que les peuples s'entredéchirent nos deux hommes vont se regarder, se comprendre sans un mot. Ils sont deviennent grands dans leur intégrisme, leur peine respective se reflète dans un prisme commun, un cri pour la paix.
Puissant, âpre, jamais manichéen, un film indispensable pour comprendre la géopolitique moderne.
" Et soudain il se parlèrent".